Journal de Bord - Thomas Boudat : «Prêt pour le combat»

 

Vidéo - Saint-Quentin, la piste aux étoiles

Il y a moins d'un an, le 2 mars 2014 pour être précis, Thomas Boudat devenait champion du Monde de l'omnium à Cali en Colombie. À partir de vendredi après-midi, le Français remettra son titre en jeu sur le Vélodrome National de Saint-Quentin-en-Yvelines, pour ce championnat du monde à domicile. Le pistard de l'équipe Europcar a débuté son aventure sous ses nouvelles couleurs le 29 janvier dernier, sur le Trophée Campos. 161e de la course espagnole, il a vécu un départ chez les professionnels plus que difficile, puisqu'il a chuté lourdement dans le final, alors qu'il préparait le terrain pour le sprinteur maison, Bryan Coquard. Le bilan de ce vol plané a été beaucoup moins grave qu'annoncé au départ... Heureusement pour lui et pour ses objectifs, Boudat n'a subi "qu'un" trait de fracture au poignet. Sa participation au Mondial n'a donc jamais été remise en cause, malgré la douleur. Par contre, sa préparation finale n'a pas été parfaite, puisqu'il n'a pas pu participer à l'Etoile Bessèges, une course qui devait lui permettre de prendre de la force. Pour combler ce manque et pour arriver au meilleur de sa forme le jour j, La Boud est parti en Espagne pour rouler avec son équipe formatrice, le Vendée U, et a, par la suite, pris part au stage de préparation sur la piste de Bordeaux, tout près de chez lui. Dans ce nouveau Journal de Bord avec Cyclism'Actu, Thomas Boudat revient en détails sur les derniers instants de sa préparation et sur ses ambitions, normalement élevées pour un champion du Monde en titre, pour "LA course de l'année". 

 

⇒ Les débuts sur la route et la blessure au poignet

J'ai repris ma saison sur route lors du Trophée de Majorque. C'était ma première course chez les professionnels. Et j'ai été assez perturbé par le déroulement de la journée. Une échappée est partie dès le kilomètre 0. Et nous, derrière, on se tournait les pouces ! Par contre, à l'inverse, en fin de course, j'ai vu la différence de niveau avec le monde des Amateurs. Quand le sprint a commencé à se préparer, ça roulait beaucoup plus vite que ce que j'avais pu connaître jusqu'auparavant.

 

"Je me dis que ces choses-là me permettent de m'endurcir"

 

Avant ma chute, tout se déroulait correctement... Pour moi, il était impensable de ne pas finir ma première course sous les couleurs de l'équipe Europcar, en tant que professionnel. À l'arrivée, mon poignet était très enflé, j'avais tous les symptômes d'une fracture du scaphoïde... J'ai eu vraiment très peur. J'ai tout de suite pensé au Mondial de St Quentin ! J'ai eu de la chance d'être bien entouré à ce moment-là. Je suis resté au repos pendant 4 jours, jusqu'à ce que je puisse faire des examens chez moi. Finalement, je n'ai eu "qu'un" trait de fracture au radius. J'ai vraiment été soulagé après cette nouvelle !

Ces derniers temps, je ne suis pas verni par la chance... Que ce soit dans le vélo ou en dehors. Mais, je me dis que ces choses-là me permettent de m'endurcir, et que malgré tout, ça reste toujours quelque chose de positif ! J'aimerais bien que la roue tourne, c'est sûr. Et SURTOUT cette semaine, devant tous mes proches !

 

⇒ La préparation finale pour les Mondiaux 

Cette chute n'est pas arrivée au meilleur moment... Mais, c'est le sport et il faut composer avec tout cela. J'ai eu de la chance d'avoir été pris en charge très rapidement sur Bordeaux. Je remercie d'ailleurs mon kiné Damien ainsi que le Docteur Thoribé. Bien que je savais que j'allais avoir un peu mal sur le vélo, je suis immédiatement parti en stage avec le Vendée U à Salou, qui était là-bas pour préparer la saison, pour essayer de limiter les dégâts. Dans un premier temps, j'ai pu rouler à mon rythme sans trop bousculer mon poignet. J'ai pu bien travailler et faire de bonnes sorties foncières.

Concernant mon poignet, je strap à chaque fois que je roule. Je ne roule plus avec mon attelle, mais j'ai encore besoin d'un maintien. Une fois rentré du stage en Espagne, j'ai pris part au stage piste de l'équipe de France à Bordeaux. Nous n'avions pas la possibilité de faire ce stage à St Quentin... Et c'est pour ça que nous l'avons fait a Bordeaux. J'étais donc le local du stage !

 

"Dans l'approche finale de ce Mondial, j'ai travaillé tous les domaines de l'omnium"

 

Je pense qu'il n'y a pas que ce stage qui m'a permis de monter en puissance. C'est un tout en fait ! Avant ma chute, je commençais à arriver en très bonne forme. Et même si j'ai perdu du temps, je n'ai pas tout perdu. J'ai dû faire en fonction de ma blessure. Au début surtout, notamment sur les séances de départ. Mais, mon poignet a bien réagi à tous les efforts.

Dans l'approche finale de ce Mondial, j'ai travaillé tous les domaines de l'omnium : la vitesse, la poursuite, le départ. Tout ça dans le but de peaufiner les derniers réglages.

 

⇒ Les ambitions

Je ne suis certainement pas à 100 % de ma forme, mais mentalement je suis prêt pour le combat. Et, c'est ça le plus important !

Je ne me compare pas à l'an dernier. Tout est différent. Là, je cours avec la pression du titre. Et le fait d'être à domicile rajoute une pression supplémentaire... J'ai été champion du Monde l'an dernier. Et cette année, je ferai de mon mieux pour l'être de nouveau, même si c'est très difficile et que l'exploit du doublé n'a jamais été réalisé... Quoiqu'il en soit, j'ai hâte d'être au départ de la course devant mon public !

Les derniers entraînements se sont bien déroulés dans l'ensemble et la piste est très rapide. Je pense qu'il va y avoir un beau spectacle.

 

"Je viens pour conserver mon titre, qui plus est en France"

La chute n'a rien changé à mes ambitions ! Je viens pour conserver mon titre, qui plus est en France. C'est sûr que le public va nous porter dans les épreuves. Ça va nous permettre de nous livrer à 300 %.

Si je termine sur le podium, ce ne sera pas une grande déception, même si je serai forcément très triste de quitter ce beau maillot irisé...

 

⇒ La pression sur les épaules

C'est vrai que c'est la première fois que je ressens une pression aussi forte... Pourtant, j'ai quand même fait pas mal de compétitions à haut niveau. Mais là ... ça a une saveur particulière. Je ne veux pas décevoir les gens qui sont derrière moi et qui m'ont fait confiance. Si je n'avais pas mon titre à défendre, c'est sûr, que les attentes seraient peut-être différentes, mais là, les choses sont ainsi et je dois faire avec.

Je n'ai pas le droit à l'erreur. Mais, le sport c'est comme la jungle, le plus dur ce n'est pas d'arriver à être le roi, c'est de le rester ! Dans tous les cas, je me donne toujours les moyens de réussir et c'est ça le principal. En omnium, il y a aussi un facteur chance qui est important le jour de la course. À moi de la provoquer.

 

"La pression est très forte, mais je dois l'utiliser comme source de motivation !"

La pression est très forte, mais je dois l'utiliser comme source de motivation ! Je suis jeune et je dois profiter de tout cela.

On pourrait penser que je suis totalement décomplexé, mais, en réalité, ce n'est pas tout à fait ça... Certes, j'ai déjà été champion du monde, c'est magnifique, mais je suis un gagnant. Et je ne veux pas m'arrêter là ! À l'heure de remettre mon titre en jeu, je suis encore plus exigeant avec moi-même que d'habitude. Le Mondial, c'est LA course de l'année.

 

⇒ L'omnium et les concurrents

Je me livre toujours à 100 % dans un omnium. Je ne compte pas mes coups de pédale. Je prends les épreuves les unes après les autres, sans penser à ce qui peut se passer après.

Avec ce nouveau format de compétition, il est difficile de prévoir un schéma type et dire que je vais prendre l'ascendant à tel ou tel moment. C'est sûr que les épreuves en peloton sont censées me favoriser, mais je progresse constamment sur les autres épreuves. Pour ce qui est du kilomètre, j'ai fait une séance la semaine passée. J'ai eu mal au poignet au départ, mais je me soigne bien et j'espère que ça ira bien. Et puis, j'ai connu pire ! J'aurai pu ne pas être ici, alors je ne vais pas pleurer parce que j'ai mal au poignet sur un départ.

 

"Le champion du Monde en titre c'est moi et personne d'autre !"

Il n'y a pas de places idéales sur chaque épreuve. Bien sûr, le top c'est de tout gagner, mais c'est impossible ! Tout se fait sur la course aux points, maintenant. Il est certain que je dois me rapprocher le plus possible de la première place dans chaque épreuve.

Il y beaucoup de concurrents cette année. Je dirai que les 23 autres coureurs sont dangereux pour le titre. Car on vient tous pour gagner. Après il y a de très bons coureurs. Elia Viviani n'a pas caché ses ambitions et arrive très en forme. Mais, il n'y a pas que lui ! Il y a des anciens champions du Monde de la discipline, comme Aaron Gate ou Glenn O'Shea. Il y a aussi des coureurs qui sont toujours là comme Jasper De Buyst ou encore le Colombien Fernando Gaviria, qui s'est payé le luxe de battre Cavendish au sprint. Mais, je ne crains personne en particulier. Le champion du Monde en titre c'est moi et personne d'autre !

La manche de Coupe du Monde à Cali m'a rassuré, même si j'ai loupé mon scratch... J'ai retrouvé quelques sensations là-bas et j'espère que ça ira beaucoup mieux ici.

 

⇒ La "déception"

Je voulais faire une autre épreuve à côté de l'omnium, pour pouvoir un peu évacuer la pression. Et aussi parce que je m'en sentais capable.

Ce fut une grosse déception de ne pas être aligné sur une autre course... Mais, je fais avec et je suis désormais passé à autre chose. J'ai eu une discussion avec Steven. Là, j'ai seulement la tête à la compétition. Je ne pense plus à ce que je fais ou pas. De toute façon, les sélections font toujours des heureux et des malheureux... Je fais partie des malheureux pour ce coup-ci, mais je reviendrai encore plus conquérant !

 

"Avoir le même cadeau d'anniversaire que l'an dernier"

Concernant ma critique sur les coureurs qui reviennent sur la piste que pour les Mondiaux en France, j'ai dit ce que j'avais à dire. Je ne tiens pas à entretenir la polémique. C'est fait maintenant et ça ne sert à rien de bloquer sur des choses comme ça.

Je préfère aller de l'avant ! Et, maintenant, je n'espère qu'une seule chose : avoir le même cadeau d'anniversaire que l'an dernier. Ce serait PARFAIT ! Un an ça passe beaucoup trop vite...

Propos recueillis par Alexis ROSE.

 

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