Journal de Bord - Thomas Boudat : «M'illustrer au plus vite»

 

Nous avions quitté Thomas Boudat après le championnat du monde sur route, à Ponferrada, en septembre dernier. Depuis ce "moment difficile", de l'eau a coulé sous les ponts... Mais, cet objectif raté, à cause d'un saut de chaîne dans les derniers mètres, a vraiment eu du mal à passer dans la tête du champion du monde de l'omnium. Quelques mois plus tard, avec de nouvelles médailles tricolores, obtenues aux championnats de France sur piste, autour de cou, nous retrouvons Thomas dans son habituel Journal de Bord. Cyclism'Actu va continuer à le suivre pendant sa première année en tant que néo-pro. Dans ce premier opus de la saison, le désormais coureur d'Europcar est revenu en détails sur sa saison 2014, qui l'a vu franchir un pallier conséquent. Thomas a, par la suite, évoqué sa saison 2015. Il essayera de remplir, au mieux, ses objectifs, à la fois sur la piste et sur la route, où il va découvrir le haut niveau dès le Challenge de Majorque. Place au premier Journal de Bord, version 2015, de Thomas Boudat !

 

 

⇒ Retour sur le championnat du monde sur route...

Sur le Mondial, j'avais pour consigne de rester le plus au chaud possible, afin de pouvoir passer la dernière difficulté du parcours dans les meilleures conditions. C’est ce que j’ai fait. Le plan se déroulait à merveille. Même si je me suis retrouvé esseulé à l’entame du sprint final, je m’étais suffisamment caché pendant la course pour pouvoir faire mon sprint tout seul. Malheureusement, je n’ai pas eu la chance de pouvoir le disputer... En voulant éviter une plaque d’égout à 800 mètres de la ligne, j’ai déraillé... J’ai perdu une bonne trentaine de places. Du coup c’était fini pour moi...

Ce fut un moment difficile pour moi. Et ça l’est toujours quand j’en reparle, même si avec le recul j’ai quand même pu tirer du positif de cette course. J’ai vu que j’étais au niveau. Je n’aurai pas pu gagner, mais je pense que le podium était jouable. C'est ça qui est d’autant plus rageant ! Maintenant Europcar n’est plus World Tour, donc ça peut me permettre de retenter ma chance cette année. Si l’opportunité m’est offerte...

 

 

⇒ Les championnats de France sur piste

Après le championnat du monde, je suis directement reparti sur Paris pour participer aux championnats de France sur piste. J'y ai, certes, gagné 3 titres, mais j’étais un peu déçu. Ma course aux points s’est très mal passée. C’est un championnat qui a été difficile pour moi. D’une part, car je me suis aligné sur toutes les épreuves. Et d’autre part, car j’avais encore la frustration du championnat du monde sur route en tête.

 

"Je suis un gagneur et je n’aime pas perdre"

 

Je ne tiens pas à gagner pour prouver quoique ce soit. Je suis un gagneur et je n’aime pas perdre. C’est sûr que mon maillot de champion du monde m’oblige d’avoir un certain rendement sur chacune de mes sorties sur piste. Et c’est quelque chose qui m’a beaucoup changé cette année. Mais, après je pense avoir le droit, comme tout le monde, de ne pas être au top à chaque compétition. Même si je donne à chaque fois le meilleur de moi-même !

 

 

⇒ Le bilan de la saison 2014

Ce fut une très grande année pour moi ! Et j’espère qu’elle en appellera d’encore meilleures. Mais c’est sûr que je rêvais d’être champion du monde et je l’ai fait. J’ai été performant sur presque tous les rendez-vous que je m’étais fixés. Je suis donc forcément satisfait de cette saison.

C’est sûr que cela n’a pas été facile tout au long de la saison, j’ai connu des moments difficiles comme au mondial route, mais j’ai connu tellement de bons moments à coté : le mondial sur piste, les sélections en équipe de France. Au final, la balance est largement équilibrée. Je n’ai pas d’anecdote en particulier, mais juste une phrase d’Eric Vermeulen, qui m’est revenue à l’esprit quand j’ai signé chez les pros. J’avais eu une discussion avec lui concernant mon avenir à la sortie des rangs juniors. Nous parlions de mes prédécesseurs du pôle qui avaient brillé par leurs résultats. Il m’avait répondu : "Couillon, tu fais partie du même wagon qu’eux". Quand j’y repense maintenant je trouve ça assez marrant !

 

"Je pense que l’on peut toujours faire mieux"

 

Je pense que l’on peut toujours faire mieux, nul n’est parfait. Ma programmation n’a pas été si mauvaise que cela. J’ai eu de la chance que les entraîneurs nationaux ont joué le jeu, aussi bien que ce soit sur la route ou sur la piste. Ça facilite de suite la chose. En plus de cela, mon équipe ne s’est jamais opposée à des sélections piste ou route, même s'il y avait de grosses échéances pour eux en même temps. Cela m’a permis d’avoir une bonne progression cette année.

 

 

⇒ Le changement de cap

Il me tardait de franchir le cap, j’avais envie de découvrir de nouvelles choses dans le vélo, de nouvelles courses, de nouvelles têtes...

J'ai la chance d’avoir signé chez Europcar. Ils me permettent de préparer la piste en vue des JO de la meilleure des façons. En plus de cela, je reçois l’aide de Benoit Genauzeau sur la piste, désormais. C’est l’idéal pour moi, car il va pouvoir gérer au mieux mon calendrier. Il a une approche du vélo qui me correspond tout à fait. Je pense que c’est une chance pour moi qu’il puisse me suivre sur piste et sur route !

 

"Il faut confirmer, travailler encore plus dur afin de progresser encore"

 

Cette signature chez les pros, ce fut un grand moment pour moi ! Après je me répète, mais ce n’est pas le tout d’être pro pour dire que l’on est pro. Maintenant, il faut confirmer, travailler encore plus dur afin de progresser encore. C’est sûr que quand j’étais petit je voyais ça comme quelque chose d’incroyable, mais maintenant je ne peux plus me permettre de penser ça. Sinon je ne serai pas acteur de mon projet. Je subirai les évènements plus qu’autre chose.

 

 

⇒ Les objectifs sur piste et sur route

Pour l’instant je ne me fixe pas d’objectifs. Je ferai de mon mieux. C’est sûr que j’ai des objectifs personnels sur piste, mais sur route je ne me fixe pas de limites ! Je ne veux pas penser à ce que je ferai dans 5-6 ans. Ça me vieillit rien que d’y penser ! Pour l’instant je suis tourné vers mes deux prochaines années avec le projet d’allier route et piste jusqu’aux JO. J’ai envie de continuer à avoir de bons résultats. Et je pense que le fait d’allier route et piste au plus haut niveau est une bonne chose, à condition de bien gérer le tout.

 

"Ça m’apprendra à gérer au mieux une pression très forte"

Mes objectifs sur piste sont clairs. Le but final est bien entendu les JO. Mais, avant cela il y aura le championnat du monde à St Quentin. Ce sera un gros rendez-vous pour moi. Avoir la chance de disputer un mondial chez soit, c’est énorme !

Au début j’étais tout excité à l’idée de pouvoir participer à un mondial en France, surtout en étant champion du monde sortant. Mais, d’un autre côté cela rajoute une pression supplémentaire à gérer. Dans tous les cas c’est une bonne chose, car ça m’apprendra à gérer au mieux une pression très forte. Et puis après pour ce qui est de la compétition en elle-même, je rêve tout simplement de gagner en France. Être champion du monde c’est bien, l’être en France, devant son public, c’est le must !

 

"Le nouveau règlement de l’omnium a bouleversé mon approche de la course"

 

Le nouveau règlement de l’omnium a bouleversé mon approche de la course. Les épreuves ne se disputent plus de la même façon, les échauffements ont changé et les stratégies aussi. L’omnium est une discipline très dure et désormais c’est la seule discipline individuelle disputée en coupe du monde. Donc c’est sûr que je ne ferai que cela au niveau des manches de la coupe du monde. Après, sur un champion du monde, j’espère pouvoir être aligné sur des courses en peloton, autre que l’omnium, même s'il faudra bien gérer la récupération.

 

 

⇒ La préparation hivernale

Ma préparation pour le mondial se passe bien, pour l’instant. Je ne suis pas en avance ni en retard. Je croise les doigts pour que tout se passe bien jusqu’au mondial. Avec le départ d’Hervé (Dagorne, ndlr) et la fermeture du pôle France de Talence, cette fin d’année fut très difficile pour moi... Heureusement, le DTN a été présent quand j’ai eu besoin de lui. Il m’a permis de pouvoir reconstruire un environnement stable pour cette nouvelle saison. Notamment avec le maintien d’un préparateur physique (Gael Le Gledic, ndlr), et avec le renfort de Benoit pour tout ce qui est piste et route. Pour l’instant, le projet est tout neuf, mais j’y crois beaucoup, car chacun d’entre nous est très motivé !

 

"Il fallait que je récupère car les saisons sont longues"

Je n’ai pas beaucoup changé ma préparation cet hiver, j’ai repris les bases de l’année dernière, en modifiant un peu car je ne suis pas allé en Guadeloupe, ni au Mexique pour les 2 premiers rendez-vous internationaux. Il fallait que je récupère car les saisons sont longues. J’ai pu profiter de quelques jours de vacances. J’ai fait une coupure plus longue que d’habitude, ce qui explique aussi que la forme revient moins vite. Dans tous les cas, je me prépare pour le 20 février. En ce qui concerne les autres rendez-vous de la saison, je ne sais pas encore lesquels je choisirai. Toujours est-il que j’aimerai m’illustrer au plus vite sur route !

 

 

⇒ Les débuts avec Europcar

J’ai participé au premier stage a Calpe avec l’équipe. Tout s’est très bien passé ! Je ne suis pas trop dépaysé en venant du Vendée U. Je vais reprendre ma saison route lors du trophée de Majorque et j’enchaînerai avec l’Etoile de Béssèges. Ensuite, je retournerai sur piste pour la finalisation de ma préparation lors d’un stage au vélodrome de Bordeaux. Je pense que c’est un beau programme. Il va me permettre de monter en puissance pour le mondial. La route va m’apporter la force qui me manque en poursuite et sur les épreuves en peloton. 

 

"En revanche, ça ne me déplairai pas de découvrir certaines classiques..."

Mon rôle sur route n’est pas arrêté pour 2015. Nous verrons comment se passe les courses du début de saison. Je pense que j’aiderai Bryan (Coquard, ndlr) sur les premières courses.

 Du fait que nous ne soyons plus World Tour, l’équipe ne va seulement disputer que le Tour de France. Pour moi, c’est donc impossible d’envisager d’y participer cette année et donc de faire un Grand Tour. Je n’ai que 20 ans. Et j’ai d’autres choses à découvrir avant de pouvoir faire un Grand Tour. En revanche, ça ne me déplairai pas de découvrir certaines classiques...

 

Propos recueillis par Alexis ROSE.

 

Les précédents Journaux de Bord de Thomas Boudat : #1, #2, #3, #4, #5, #6, #7, #8, #9.