Route/Bilan - Intermarché-Wanty-Gobert Matériaux a fait sensation
Par Arthur De SMEDT le 29/12/2022 à 22:17
Une saison historique à plus d'un titre pour l'équipe Intermarché-Wanty-Gobert Matériaux. Après une première année mitigée au sein de l'élite WorldTour en 2021, la formation belge a explosé tous ses compteurs en 2022 : record de victoires - 24 au total, dont cinq en WorldTour - et une incroyable cinquième place au classement UCI par équipes, détrônant même l'armada Quick-Step Alpha Vinyl de son statut de meilleure équipe de Belgique ! L'écurie dirigée par Jean-François Bourlart a notamment surfé sur une excellente première partie de saison, sous l'impulsion de sa pépite et révélation de 2022, Biniam Girmay. Dans le sillage de l'Érythréen, vainqueur historique de Gand-Wevelgem, l'ensemble de l'effectif s'est mis au niveau avec pas moins de onze coureurs victorieux, aussi bien sur les Classiques que sur les Grands Tours (3 étapes et 3 top 10). Récit et bilan de cette belle dynamique collective qui ne demande qu'à être confirmée en 2023.
Vidéo - Un Biniam Girmay historique a montré la voie en 2022
Just incredible pic.twitter.com/8VV2Rozqap
— Biniam Girmay (@GrmayeBiniam) March 28, 2022
Biniam Girmay, la révélation historique
Si Alexander Kristoff a été le coureur le plus consistant de l'équipe, c'est bien Biniam Girmay - du haut de ses 21 puis 22 ans en avril - qui symbolise le plus la réussite d'Intermarché-Wanty-Gobert Matériaux en 2022. Le vice-champion du monde Espoirs 2021 a définitivement pris son envol avec 4 succès et une 16e place au classement UCI 2022, confirmant son énorme potentiel en tant que sprinteur-puncheur. Débloquant son compteur et celui de sa formation dès fin janvier au Trofeo Alcúdia-Port d'Alcúdia, le natif d'Asmara est ensuite monté en puissance sur Paris-Nice (trois top 6), Milan-Sanremo (12e pour sa première participation) et l'E3 Saxo Bank Classic (5e). La suite appartient à l'Histoire du cyclisme avec une victoire sensationnelle sur Gand-Wevelgem, devenant le premier Africain noir à remporter une Classique WorldTour.
"Gand-Wevelgem est la course qui transforme notre équipe. Exactement six ans après l’inoubliable disparition d’Antoine Demoitié le 27 mars 2016, Biniam Girmay a provoqué une grosse sensation dans notre développement", a confirmé Jean-François Bourlart au moment de dresser le bilan de sa formation. Un changement de dimension que va poursuivre Girmay sur le Tour d'Italie, pour son tout premier Grand Tour. Pas impressionné, il fait le show et livre un magnifique duel avec Mathieu van der Poel (Alpecin-Deceuninck). Après cinq top 5 en huit étapes, il finit par rentrer à nouveau dans l'Histoire en s'imposant en patron à Jési lors de la 10e étape, offrant à l'Afrique noire sa première victoire dans un Grand Tour.
Biniam Girmay 🙌 Mathieu van der Poel ðŸ‘
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Iconic moment. pic.twitter.com/HgMMmkw4gq
Une journée mémorable à plus d'un titre, puisque l'Érythréen va alors être victime du fameux et malheureux incident du bouchon, se blessant à l'oeil gauche en ouvrant une bouteille sur le podium de la cérémonie protocolaire. Contraint à l'abandon et coupé en plein élan, Biniam Girmay va mettre plusieurs semaines à s'en remettre et connaîtra une deuxième partie de saison plus mitigée, avec une seule victoire lors du CLM de son championnat national fin juin. Malgré de belles places d'honneur sur la Bretagne Classic (6e), le GP Québec (3e) ou encore le GP de Wallonie (2e), nul doute que cette fin d'année frustrante n'aura pas pleinement satisfait le prodige africain, qui devrait revenir le couteau entre les dents pour lever les bras en 2023.
La résurrection d'Alexander Kristoff et Louis Meintjes
Comme revigorés par la bonne dynamique de l'effectif belge, Alexander Kristoff et Louis Meintjes ont retrouvé leurs lettres de noblesse en 2022. Le premier, fraîchement transféré l'hiver dernier après trois saisons sur la pente descendante chez UAE Team Emirates (3 succès en 2 ans), a rappelé à quel point il pouvait être un sprinteur précieux et efficace, avec 16 podiums dont 5 victoires, assortis d'une 8e place au classement UCI - son meilleur classement depuis 2019. S'il n'a pas réussi à scorer au niveau WorldTour, notamment au terme d'un Tour de France décevant, le Norvégien de 35 ans a été omniprésent le reste du temps, remportant la Classique d'Almeria, le Grand Prix de l'Escaut, le Circuit Franco-Belge, une étape sur son Tour de Norvège et une autre sur le Tour d'Allemagne.
L'autre "résurrection" est venue d'Afrique du Sud, avec un Louis Meintjes plus vu à pareille fête depuis 2017 ! Après un début de saison discret, le natif de Prétoria s'est réveillé à partir de juin, levant enfin les bras - une première depuis... sept ans ! - sur le Tour des Apennins. Une véritable libération pour le grimpeur de 30 ans, qui a ensuite retrouvé son meilleur niveau en montagne. Sixième du Critérium du Dauphiné, il va enchaîner avec un très beau Tour de France, se montrant pour une fois offensif et passant tout près d'un triomphe à l'Alpe d'Huez. Finalement huitième du général - comme à ses plus belles heures en 2016 et 2017 -, il confirmera ce retour en grâce sur le Tour d'Espagne avec son tout premier succès en WorldTour et une 11e place au général.
Rota, Thijssen, Hermans, Hirt... ils ont surfé sur la dynamique collective
Dans le sillage de ces belles performances, de nombreux coureurs ont élevé leur niveau et réalisé leur meilleure saison. C'est le cas de Lorenzo Rota, auteur de ses premiers succès chez les Pros sur le Sazka Tour (1 étape + le général) en août. L'Italien de 27 ans s'est révélé comme un spécialiste des courses par étapes accidentées - 4e du Tour de Belgique et du Tour de Wallonie, 5e du Tour du Limousin -, mais il pourra longtemps regretter cette 2e place lors de la 12e étape du Giro. Un regret que n'aura pas Jan Hirt. Après avoir dompté la Green Montain et le Tour d'Oman en février, le Tchèque de 31 ans a participé au Tour d'Italie de rêve de son équipe, remportant magistralement la 16e étape et finissant à une surprenante 6e place au général, juste devant son coéquipier Domenico Pozzovivo (8e), toujours présent à 40 ans.
Derrière Alexander Kristoff et Biniam Girmay, le pôle sprint s'est également signalé grâce à Gerben Thijssen. Après plusieurs années chez Lotto Soudal, le coureur de 24 ans n'aura pas mis longtemps à s'acclimater à sa nouvelle équipe, avec 17 top 10 et 3 victoires à son actif : une étape des 4 Jours de Dunkerque, une autre sur le Tour de Pologne, et enfin la Flèche de Gooik pour conclure une saison pleine. Autre Belge à s'être révélé, Quinten Hermans a signé l'une des plus grosses surprises de 2022 avec sa 2e place sur Liège-Bastogne-Liège. Le cyclocrossman de 27 ans a été plus irrégulier ensuite, mais a tout de même réalisé un beau Tour de Belgique (1 étape, 3e du général) et un beau podium sur la Bemer Cyclassics. Taco van der Hoorn (Brussels Cycling Classic), Rein Taaramäe (Champion d'Estonie du CLM), Andrea Pasqualon (Circuit de Wallonie) et Jan Bakelants (5e étape du Tour de Wallonie) auront aussi apporté leur victoire à l'édifice.
24 victories,
— Intermarché-Wanty-Gobert (@IntermarcheWG) October 18, 2022
11 winners,
One family team.
Intermarché-Wanty-Gobert succeeded against the odds in 2022 🆠pic.twitter.com/4B5MBofpnM
Un nouveau statut à confirmer en 2023 ?
Désormais installée dans le top 5 de la hiérarchie mondiale, la future nommée Intermarché-Circus-Wanty managée par Aike Visbeek - à la tête du pôle performance depuis 2021 - va devoir relever un nouveau défi en 2023 : parvenir à faire aussi bien qu'en 2022. "L'équipe doit rivaliser sur les classiques, a affirmé le technicien néerlandais. Cela ne veut pas dire que nous devons gagner mais nous devons chasser des top 5 et des podiums. En clair, nous visons une place dans les dix premiers du classement des équipes de l'UCI. Ce sont les objectifs énoncés. Sur les années futures, nous voulons gagner un Monument. Mais il faut être cohérent, gagner ce type de course se prépare sur du long terme." Pour cela, la formation belge s'est montrée très active sur le marché des transferts, tout d'abord pour renforcer son staff technique avec Laurenzo Lapage, Dimitri Claeys, Kévin Van Melsen et Christophe Prémont.
Elle a aussi effectué un recrutement offensif à l'intersaison - 11 arrivées dont Rui Costa (UAE Team Emirates), Lilian Calmejane (Team TotalEnergies), Niccolo Bonifazio (Team TotalEnergies) et surtout Mike Teunissen (Jumbo-Visma) - pour compenser les départs d'Alexander Kristoff (Uno-X Pro Cycling Team), Quinten Hermans (Alpecin-Deceuninck), Jan Hirt (Soudal-Quickstep) ou Domenico Pozzovivo. De nombreux changements qui pourraient impacter l'alchimie et la dynamique de 2022. Le duo Teunissen-Girmay sera particulièrement attendu sur les Classiques, et potentiellement sur le Tour de France, sur lequel l'équipe créée en 2008 n'a toujours pas gagné en 5 participations. Pour le reste, les Louis Meintjes, Lorenzo Rota et Gerben Thijssen devront à nouveau répondre présents, avec pourquoi pas l'éclosion de certains jeunes à fort potentiel comme le français Hugo Page (21 ans) ou le Belge Rune Herregodts (24 ans). Réponse dans quelques semaines !