INTERVIEW - Paul Seixas : «Je sais que je ne ferai pas de Grand Tour en 2025»

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— Cyclism'Actu (@cyclismactu) December 9, 2024

Quel est ton rêve de carrière ? Le Tour de France, forcément ?

Le Tour de France, je pense que pour tous les français, et pour beaucoup de coureurs dans le monde, c'est le rêve d'un peu tout le monde. Et après, c'est sûr que quand tu vois le Tour, ça peut se perdre partout. Et c'est aussi ce qui m'a donné envie d'être polyvalent et de ne pas me donner de limite, c'est que si t'es bon dans tous les domaines, ça sera toujours un avantage par rapport aux autres, et si jamais tu te trouves dans une mauvaise situation, il y a toujours moyen de s'en échapper si tu ne t'es jamais donné de limite. Voilà, toujours être polyvalent et se faire plaisir sur le vélo.

Physiquement, c'est quoi ton gabarit ?

Je fais 1m85 et là en ce moment je fais 62 kilos. J'ai pris un peu, après j'ai fait un peu de muscu là. Puis cet hiver, je vais travailler des fibres différentes de l'hiver dernier où je faisais du cross, c'est sûr que c'est pas pareil. Mais voilà, j'ai pris 1 ou 2 kilos, après on verra ce que ça donnera durant la saison. Généralement, je ne prends pas trop et je ne perds pas trop, j'ai un métabolisme comme ça qui me permet de ne pas trop perdre.

Finalement, tu es très léger, ce qui peut expliquer que tu marches aussi bien en montagne, mais alors comment tu arrives à dégager autant de puissance pour décrocher un titre de champion du monde sur le chrono ?

Sur le chrono, c'est plus que de la puissance. Il faut énormément de puissance bien sûr, mais j'ai peut-être un don là-dessus, je sais pas, c'est un peu inexplicable. J'ai surtout bien travaillé pour cette échéance, et si tu es prêt le jour J... En fait le plus dur c'est de gérer l'événement, et moi j'arrive plutôt bien à gérer ça, donc ça a été. Ensuite, il y a eu un autre travail qui est tout aussi important, voire plus important, c'est la position. Chaque détail compte, et d'ailleurs j'ai fait 3 études aérodynamiques, plus 2 à l'époque, donc une avec l'équipe de France, une avec Aeroscale, l'équipe de Decathlon. Je pense que ces études-là ont été hyper importantes pour la suite, et il y a eu tellement de changements qu'au final... Si je prends mon vélo de chrono de base, et l'équipement que j'ai eu au championnat du monde, ça n'a quasiment rien à voir, et je me dis, à la fin, il y a 6 secondes, ces 6 secondes elles sont largement sur toutes les études que j'ai faites. Je pense même que je n'aurais pas été sur le podium si je n'avais pas fait tout ça, donc c'est impressionnant.

Tu te dis du coup qu'il y a une marge de progression encore à tous les niveaux, notamment celui-là ?

Il y a des marges de progression partout, il y a des gains marginaux à aller chercher partout. Et bien sûr on va se dire que ce ne sont que des gains marginaux, que ça ne gagne pas beaucoup... Mais cumuler plusieurs gains marginaux, ça fait un gros gains au final, et c'est ça qui fait la différence à haut niveau je pense. Tous les coureurs sont exceptionnels, et je pense que c'est ces petits détails qui vont aller faire la différence. Après bien sûr il y a des coureurs comme Pogacar qui sont extrêmement talentueux, mais je pense qu'il y a aussi beaucoup de gains marginaux qui font que ça fait une grosse différence au final.

Le cyclisme n'a jamais été aussi pro, aussi calculé, aussi millimétré, parfois il y a des voix qui s'élèvent, qui s'inquiètent un peu pour ça, qui disent qu'il n'y a plus la place pour le jeu, mais à t'écouter toi, on a l'impression que ça ne te pèse pas du tout, quel est ton regard là-dessus ?

Moi déjà, il ne faut pas oublier que de base c'est ma passion, et je pense que pour être professionnel à ce niveau-là, il faut être passionné. C'est sûr qu'il y a plein de trucs qui sont très millimétrés, tout le milieu est comme ça, mais une fois que tu es sur le vélo, tu ne te poses plus cette question tu fais ce que tu as à faire. Moi je profite du moment, je profite de la chance que j'ai de performer à si haut niveau. Et après, c'est sûr qu'il y a une sorte de jeu derrière, et je pense que ça, il ne faut jamais l'oublier, parce que sinon, ça ne durera pas éternellement.

A côté du vélo, c'est quoi ta vie, tu continues à faire des études ?

Oui, je fais des études à l'EM Lyon, une école de commerce, j'ai commencé cette année. C'est tout en distanciel, et on a 4 fois 3 jours de regroupement. Là, par exemple, j'ai 3 jours du 16 au 18, donc je ne pourrais pas y aller, il faut que je demande d'ailleurs un certificat pour pouvoir expliquer pourquoi je ne peux pas venir. On a des visios le lundi, et ensuite il y a un peu de travail à côté, mais franchement, c'est super bien aménagé, ça me donne vraiment le temps de m'entraîner correctement, et en même temps de ne pas avoir trop la tête là-dedans. Mais quand j'ai besoin de me ressourcer et de penser à autre chose que le vélo, je sais que j'ai l'école à côté, et je pense que c'est un très bon compromis.

C'est un bachelor en quatre ans, mais chaque année est dédoublable, donc je peux le faire en 8 ans techniquement. Après, moi je me dis que je commence tout juste le monde professionnel, je vais essayer de bosser un max cet hiver pour ne pas prendre trop de retard. J'ai envie d'aller au bout, mais plus vite ce sera fini, mieux ce sera. J'ai eu la chance de pouvoir intégrer cette école, donc je veux réussir. Je n'y aurais pas eu accès si je n'avais pas été sportif de haut niveau je pense. Et c'est important pour la reconversion plus tard, car cycliste c'est bien, mais ce n'est pas toute la vie non plus. Il faut penser à l'avenir et toujours avoir quelque chose derrière.

En dehors, c'est quoi tes passions, qu'est-ce que tu aimes dans la vie ?

Ma passion première, c'est le vélo. Après, j'aime globalement bien faire du sport, et surtout aller la montagne, marcher avec mes potes, c'est le truc que je préfère. J'aime bien la nature et prendre du temps avec mes proches.

Et comment tu te décrirais en terme de caractère ?

Je suis quelqu'un de plutôt calme et patient, de posé. Je ne suis pas très tonique dans la vie de tous les jours.

Ce qui impressionne lorsqu'on t'écoute, c'est ta maturité pout ton jeune âge, comment l'as-tu cultivée ?

Je pense que c'est aussi parce que je suis là-dedans depuis mon plus jeune âge. J'ai été pour la première fois champion de France à 14 ans, j'ai toujours un peu été dans ce système-là, et au fur et à mesure, tu prends de l'expérience. Cela fait déjà quatre ans que j'ai l'habitude de faire ça. Et c'est aussi lié à mon état d'esprit, comme je l'ai dit, je suis posé, je ne me mets pas de pression dans la vie. C'est quelque chose d'essentiel dans le sport de haut niveau. Après, chacun est différent, ça fait aussi partie de mon tempérament. Savoir rester calme, c'est sûrement pour ça que je suis en WorldTour aujourd'hui.

Tu parlais de ta future reconversion, quel serait ton métier passion ?

Pour le moment je ne sais pas trop, mais j'aime bien tout ce qui est commerce, management... Donc on verra.

Et pour finir, quel serait ton graal pour la saison 2025 ?

Que toute la saison se passe bien ! Que j'apprenne des choses et progresse, que sur le vélo ça marche et que je fasse de bons résultats. J'aimerais faire une saison qui promette pour la suite. Je sais que je ne ferai pas de Grand Tour, ce qui est normal car je n'ai pas encore le foncier pour le moment. J'aimerais que cette saison s'inscrive dans la continuité de mon projet pour résumer.