Les carnets secrets - Marc Fayet : «Le Festival de Cannes ce Giro 2023»
Marc Fayet, vous connaissez ? Vous avez déjà pu le découvrir et le lire il y a quelques temps déjà sur Cyclism'Actu ! Marc Fayet est donc de retour avec sa chronique ou plutôt sa rubrique "Les carnets secrets". Pour rappel, Marc Fayet, né en 1961, est un homme du théâtre et de la scène. Acteur et metteur en scène mais aussi passionné de vélo. Marc s'est toujours investi : il écrit, commente, agit autant qu'il le peut dans le cyclisme, notamment sur le Tour du Finistère dont il est aujourd'hui et depuis 2021, le président du comité d'organisation. Marc Fayet et "ses" carnets secrets, ce sera désormais à retrouver régulièrement sur Cyclism'Actu.
Vidéo - Giro, Dauphiné, Tour : la Chronique Guimard sur Cyclism'Actu
"Coureur singulier et qui vient d’un tout petit pays atteignant à peine 2 millions 101 mille habitants"
Il y a dans notre univers cycliste des individus qui ont l’art de bousculer les ordres établis, de remuer les scénarios attendus, de faire bouger les lignes de conduite, de déranger les logiques sportives. Dans cet exercice il y a un coureur qui chaque fois est parvenu à nous surprendre, autant par ses exploits que par ses bévues, autant par sa vista que par sa scoumoune, autant par ses aptitudes que par ses lacunes, autant par son absence de plaintes que par son masque sans souffrance.
Ce coureur singulier et qui vient d’un tout petit pays atteignant à peine 2 millions 101 mille habitants (mais possédant à son palmarès en l’espace de 6 ans : 6 grands tours, 32 victoires d’étapes, 10 classiques... Soit bien plus que les Etats-Unis, la France, la Belgique, l’Espagne et l’Italie réunis) s’appelle Primoz Roglic. Sa particularité tient tout d’abord à sa modestie car si ses exploits sont d’importance, il sait qu’il a comme jeune confrère de son pays, le plus gros phénomène sur pédalier que la planète cyclisme possède depuis le retrait d’Eddy Merckx et il ne le conteste pas.
C’est donc en toute humilité, mais doté d’une motivation toujours authentique, qu’il est venu participer à ce Giro 2023 et qui était sur le point de s’inscrire comme étant le plus ennuyeux du XXIème siècle. Mais c’était sans compter sur les talents de scénariste du Slovène, un génie dans son genre, et qui nous a offert un des plus beaux retournements de situation de l’histoire (Un déraillement en plein chrono et en pleine montée) Beaucoup d’auteurs dans nos contrées auraient trouvé la ficelle un peu grosse, où comment faire chuter l’anti-héros, comment organiser la chronique d’un nouvel échec annoncé du prince de la malchance, du maladroit du peloton, du poissard qui ne pleure jamais…
"Le festival des Cannes du Slovène comme celles du Gallois"
Mais la particularité de l’écriture Slovène est de justement tout mettre en place pour que l’issue paraisse inéluctable et pourtant trouver les ressources pour parvenir au contraire. A l’heure où s’est achevé le festival Cannois sachant primer le cinéma International, c’est un autre festival de Cannes auquel nous avons eu droit en Italie…
Le festival des Cannes du Slovène comme celles du Gallois, sans oublier celles du Français, du Canadien, de l’Irlandais, de l’Anglais qui tous ont su montrer, malgré une édition lénifiante, qu’il y a toujours de la place à l’invention, à l’inspiration et donc à l’émotion, même si elle ne se résume qu’à quelques minutes, qu’à quelques centaines de mètres avant la ligne d’arrivée. Ce ne sont que des fulgurances parmi des journées d’ennui, mais c’est le propre même des moments de création car ils échappent à toute fabrication raisonnée. Aussi en raison du talent de chacun, il est juste de présenter ici le palmarès de ce 106ème Giro qui ne restera pas dans l’histoire mais dont ses acteurs y auront acquis une certaine forme d’immortalité dans l’écriture de leur sport.
Prix de la Révélation : Derek Gee
Prix de l’interprétation : Thibault Pinot
Prix spécial du Jury : Ben Healy
Prix d’honneur : Mark Cavendish
Prix de la réalisation : Geraint Thomas
Prix du scénario : Primoz Roglic