ITW - Pauline Ferrand-Prévot : «Le VTT aux JO de Rio 2016»

 

Vidéo - Pauline Ferrand-Prévot au micro de Cyclism'Actu

Première coureuse de l'histoire à cumuler trois titres de Championne du Monde dans trois disciplines différentes, Pauline Ferrand-Prévot (Rabo-Liv) a vécu une année 2015 pleine de succès. Pour 2016, la Française de 23 ans, qui se remet actuellement d'une blessure à un genou, n'a qu'un mot à la bouche : les Jeux olympiques où elle espère réaliser le doublé Route - VTT, alors qu'elle a déjà annoncé qu'elle ne s'alignerait par sur l'épreuve du contre-la-montre. Rio, Marianne Vos, le Vélo d'Or, la Rémoise se confie à Cyclism'Actu.

 

Vous avez déclaré forfait pour la saison de cyclo-cross suite à une blessure. Comment allez-vous ?

Je vais mieux, beaucoup mieux, ça fait 7 semaines que je suis blessée, enfin que j’ai appris ma blessure ; au début, c’était difficile à accepter, de me dire que je n'allais pas courir, ne pas porter le maillot de championne du monde, c’est dur à avaler mais, au bout d’une semaine, je me suis dit qu’il fallait avoir un autre objectif, c'est les Jeux olympiques.

Cette idée m’a vite consolé. Dans un premier temps, je dois me soigner d’autant que je pense aussi que cette blessure n’est pas dûe au hasard, cela fait des années que j'enchaine des saisons au plus haut niveau, c'est peut-être dur à encaisser même si, mentalement, ça ne me pose pas de problème d'aller à l'entraînement ou aux courses, car faire du vélo est ce que j’aime le plus, c'est la vie d'un sportif de haut-niveau, mais le corps, au bout d’un moment, dit stop, il a besoin de se reposer. Cette période de convalescence me permet de récupérer mentalement et physiquement, j'en avais besoin pour me régénérer.

 

Vous êtes allé à Rio, que pensez-vous des parcours proposés ?

J'y suis allé en octobre pour voir le circuit de VTT avec l'équipe de France et puis, après, j'ai reconnu le circuit sur route avec mon entraîneur Yvan Clolus. Cela s'annonce très dur et physique, il faudra être au top de sa forme pour pouvoir s'imposer ; il faudra d'abord récupérer et puis monter en pression pour être au top niveau en août. Toutes les courses qui viendront avant seront des courses de préparation pour progresser, j'ai aussi à cœur de défendre mon titre de championne du monde de VTT, j'espère être bien à ce moment-là ainsi qu'aux Jeux. Les deux parcours me conviennent, ils sont super durs, la route notamment est très physique et complet : il y a des secteurs pavés, du plat, du vent, des longues bosses, d’autres plus courtes et raides. Je suis assez polyvalente donc j’aime beaucoup ce circuit ; il faudra arriver en forme et affutée, aucune erreur ne sera permise, il y a aussi des descentes assez sinueuses et étroites, donc même en descente il faudra être au point.

 

Vous n'avez pas participé au Test-Event de Rio, pourquoi ?

J'étais un peu fatiguée et blessé, je m'étais dit qu’il ne fallait pas en rajouter, je pense d'ailleurs que c’était la première petite alerte, je n'ai donc pas couru le test-event. De plus, il n'y avait pas Jolanda Neff, la principale favorite. J'ai tout de même fait beaucoup de tours en reconnaissance, j'ai validé tout ce que j’avais à valider. Je ne cible personne mais Jolanda sera la concurrente numéro 1 pour les Jeux, c'est très technique et elle est très au point de ce côté-là, c'est la numéro 1 mondial du VTT.

 

Comment allez-vous vous organiser cette saison ?

La position sur la ligne de départ sera importante aux Jeux c'est pourquoi je vais courir en VTT pour cumuler des points UCI, c'est notamment pour cela que je ne participerai pas au Giro Rosa cette saison. On a ciblé les courses, je ferai par exemple l'impasse sur la manche de Coupe du Monde en Australie à cause du déplacement qui m'empêche de m’entraîner pendant plusieurs jours. Cette année, tout tourne vraiment autour des JO, le moindre déplacement, la moindre fatigue accumulée peuvent être déterminants.

 

"Très contente du retour de Marianne Vos"

Vous n'avez pas peur que cette alternance vous déstabilise ?

Non pas du tout parce que je ne me vois pas faire que le VTT ou que la route aux Jeux, je serai incapable de choisir une des deux disciplines, l'épreuve sur route peut aussi servir de bonne répétition avant l’épreuve du VTT… Après, je suis consciente que je ne pourrai pas avoir deux pics de forme en quinze jours d'intervalle, si je dois choisir ce sera le VTT car c’est moins tactique, sur la route ce n'est pas toujours le plus fort qui gagne. C'est pourquoi le pic de forme sera vraiment pour le VTT car c'est, je pense, là où j'ai le plus de chances de m'imposer.

De plus, quand t'as un objectif comme ça, les jours suivants tu décompresses un peu, donc je préfère me dire que la route n'est pas vraiment un objectif même si j’ai envie de gagner ; la course importante sera derrière, cela m'évitera de décompresser, c'est pour cela que je me dis que le VTT est le plus important.

 

Vous avez cumulé les récompenses en fin de saison, les internautes de Cyclism'Actu vous ont élu Meilleure coureuse de l'année. Il ne vous a finalement manqué que le Vélo d'Or.

Pour le Vélo d'Or, j'avais réagi vraiment pour rigoler mais en vrai je m'en fiche, que Thibaut Pinot l'ait eu, c'est très bien, je suis contente pour lui, il n'y a aucune jalousie. Recevoir tous ces trophées dans une période où je suis blessée, ça fait plaisir, je me dis qu'on ne m’oublie pas ; mentalement, c'était un peu dur donc ça fait du bien d'être récompensée, c'est mon lot de consolation on va dire.

 

En 2016, Marianne Vos effectuera son retour. Vous en êtes heureuse ?

Je suis très contente qu'elle revienne dans le peloton car c'est quelqu’un que j'adore, je suis en contact avec elle toutes les semaines, c’est avant tout une amie, je suis contente pour elle. C'est bien pour l’équipe qu'elle revienne car c’est elle la chef de file, c'est elle qui prend les décisions en course, des décisions que moi ou Anna van der Breggen n'étions pas vraiment capables de prendre, j'espère que cela va mettre de l’ordre dans l'équipe et bien redéfinir les rôles, c'est aussi un élément de plus dans l'équipe pour travailler ou rouler quand il y en a besoin, ça fait une fille de plus et une fille de son talent c'est génial.

En 2014, alors qu'elle était là, j'étais peut-être un cran au-dessus qu'en 2015, du moins sur la route. Elle m'a pas mal aidé à me former, à me montrer ce que je savais faire en course, pour moi elle a été d'une grande aide. Gérer le maillot de Championne du Monde sans elle, c'était plus dur. Si elle avait été là, l'année 2015 eut été différente.

 

Rabobank arrêtera le sponsoring de votre équipe en fin de saison. 

Ils recherchent actuellement un sponsor mais je n'en sais pas plus ; pour ma part, j'ai des contacts avec d'autres formations et j'ai déjà une idée d'où j'irai en cas d'arrêt.

 

En 2015, vous avez été la première coureuse à cumuler trois titres de Championne du Monde, vous vous attendiez à une telle performance ?

Non, je ne m'attendais pas à ces trois titres mais c'est vrai que j’y pensais, la veille on m'avait dit que si je gagnais je serai la première et c'est quelque chose d'énorme mais moi je participais aux Mondiaux pour gagner et rien d'autre, c'est une fois que je l'ai fait que je me suis dis que c'était quand même grand, c'est un peu mon record du monde, c'est clair et net.

 

Si vous remportez les Jeux olympiques, vous aurez pratiquement tout gagné à 23 ans.

C'est vrai que je suis jeune, les gens l'oublient souvent, après la motivation pour moi c'est d'être toujours la meilleure, c'est vraiment ce que j'aime. Je trouverai toujours d'autres objectifs… Après, le jour où je n'en aurai plus, ça voudra dire qu'il est temps pour moi de m'arrêter mais ce n'est pas du tout le cas. J'aime la vie que j'ai actuellement.

 

Vous avez conscience de devenir une sorte d'icône pour le cyclisme féminin ?

C'est ce que j'espère faire, donner envie aux petites filles et aux garçons de faire du vélo c'est quelque chose de génial. Je reçois pleins de photos de petites filles qui veulent faire comme moi, pour moi c'est la plus belle des récompenses.   

 

Propos recueillis par Valentin Nunes pour Cyclism'Actu.