Tour d'Italie - Primoz Ro(se)glic tient sa victoire... le bilan du Gee-ro
Le Tour d'Italie s'est clôturé ce dimanche avec la victoire finale de Primoz Roglic (Jumbo - Visma) après un duel extrêmement serré avec le vétéran Geraint Thomas (INEOS Grenadiers) qui n'est finalement pas devenu le vainqueur le plus âgé du Giro. Tout se sera donc joué lors d'un dernier contre-la-montre d'anthologie sur les pentes de l'impitoyable Monte Lussari. Au-delà de la lutte pour le maillot rose, la Course Éternelle nous aura, comme à son habitude, offert des moments de joies, de pincements au cœur et des drames. Des abandons en cascade, une météo horrible, des trouvailles techniques, la révélation de jeunes coureurs, le retour au premier plan d'anciennes gloires et le Grand Chelem des Danois, c'était le cocktail de ce 106e Tour d'Italie.
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Le Monte Lussari, juge de paix de la course au maillot rose
Soyons francs, la lutte pour le classement général aura tardé à démarrer. On aura dû attendre la 3e semaine et la 16e étape pour vivre la première véritable explication entre les favoris. Joao Almeida (UAE Team Emirates) décroche sa première victoire en Grand Tour devant Geraint Thomas au sommet du Monte Bondone. Primoz Roglic connait un "jour sans" mais limite les dégâts et ne perd finalement que 25 secondes, ce qui s'avèrera crucial dans sa conquête du Maglia Rosa. On le pense alors hors du coup, mais il réplique lors des étapes 18 et 19, distançant par deux fois le Portugais, mais sans parvenir à décrocher Thomas de sa roue. Nous sommes alors prêts pour un feu d'artifice final lors de la 20e étape avec les 3 favoris qui se tiennent en moins d'une minute.
Joao Almeida ne sera jamais réellement dans le coup pour espérer un retournement de situation, mais Primoz Roglic est dans un grand jour et grignote seconde par seconde sur Gé. On le pense parti vers la victoire finale, jusqu'à cet improbable saut de chaine en vue de l'arrivée. La poisse colle décidemment aux basques du Slovène. Mais ce n'était pas la fin de nos émotions. Au final, Geraint Thomas craque dans les ultimes centaines de mètres de l'ascension et perd un temps précieux. Il échoue à 14 petites secondes dans sa quête du Trofeo Senza Fine. Sans regrets, selon lui "Primoz Roglic m'a détruit. Il mérite sa victoire" déclare-t-il à l'arrivée. Nous avons à nouveau vécu un contre-la-montre final historique sur les pentes d'un col impitoyable. Mais cette fois-ci, Primoz Roglic est du bon côté de l'histoire.
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Un Tour d'Italie marqué par la pluie, les maladies et les chutes
Si la dernière semaine nous a offert un aperçu de la Dolce Vita italienne, que dire des deux premières ? Une météo pourrie, une pluie incessante et un thermomètre qui flirte avec les 0 degrés au sommet des cols. Le climax est atteint lors de la 13e étape. On décide initialement d'éviter le sommet du Col du Grand Saint-Bernard, avant d'annuler totalement son ascension. Place à une étape raccourcie à la demande des coureurs, qui n'en peuvent plus de courir dans ces conditions et qui craignent pour leur sécurité. Certains approuvent. D'autres moins. C'est le cas de Marc Madiot, directeur de la Groupama - FDJ. "On est en train de tuer notre sport" déclare-t-il même.
Tour d'Italie - Marc Madiot : "On est en train de détruire notre sport" #Giro #GirodItalia #LesRP #Madiot #Thomas #Pinot #Cyclisme #Sport https://t.co/IKfFTiAZJx
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Malgré tout, on peut comprendre les coureurs. Sur les étapes précédentes, c'était l'hécatombe. Tout d'abord, le choc à l'issue de la 9e étape. Alors qu'il vient de remporter le chrono, Remco Evenepoel (Soudal - Quick Step), champion du monde en titre et maillot rose, annonce qu'il quitte le Giro suite à une infection au Covid ! Quelques jours seulement après Filippo Ganna (INEOS Grenadiers) et une dizaine d'autres coureurs qui ont quitté les routes italiennes pour cause de maladie. Au départ des deux étapes suivantes, un total de 17 non-partants, dont 4 équipiers d'Evenepoel. Son équipe Soudal - Quick Step terminera la course avec seulement deux coureurs. Le Giro perdra également Tao Geoghegan Hart (INEOS Grenadiers) sur chute - sans doute causée par la pluie - ainsi qu'Aleksandr Vlasov (BORA - hansgrohe), candidat au top 5, et Mads Pedersen (Trek - Segafredo), plus gros concurrent de Jonathan Milan (Bahrain - Victorious) dans la quête du maillot cyclamen. N'en jetez plus, la coupe est pleine. Heureusement, le rythme des abandons diminuera par la suite, mais on aura tout de même un total impressionnant de 51 coureurs qui n'auront pas vu l'arrivée à Rome.
Derek Gee, le PouPou de ce 106e Tour d'Italie
Niveau révélation, il ne faut pas chercher bien longtemps pour trouver LE coup de cœur. Derek Gee (Israel - Premier Tech) a été l'animateur en chef de ce Giro. Encore inconnu avant le départ même parmi les fins connaisseurs, il se sera échappé lors de 7 des 18 étapes en ligne ! Cela signifie qu'il a passé près de 40% des étapes à l'avant de la course. Quatre 2e places et deux 4e, c'est un bilan pour lequel il aurait signé des deux mains. Mais au vu de ses performances, il restera un tout petit goût de trop peu. Tous les spectateurs neutres auraient souhaité au moins une victoire ou un maillot distinctif pour couronner son Tour d'Italie de folie.
Derek Gee's Giro is one for the history books. pic.twitter.com/MzcpVkA83B
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Malheureusement, le Canadien est également deuxième dans presque tous les classements annexes. Il termine non seulement derrière Jonathan Milan au classement du meilleur sprinteur et derrière Thibaut Pinot (Groupama - FDJ) dans celui du meilleur grimpeur. Mais il est également second au classement des sprints intermédiaires remporté par Toms Skujins (Trek - Segafredo) et toujours deuxième - derrière Thomas Champion (Cofidis) - au classement de la Fuga. Ce classement est remporté par le coureur qui compte le plus de kilomètres passés en tête de la course, dans un groupe de moins de 10 coureurs. Heureusement, il décrochera tout de même un prix. Il est nommé super-combatif de ce Tour d'Italie, une récompense qui ne souffre d'aucune contestation. Merci Derek pour ces moments incroyables.
A well deserved trip to the podium for Derek Gee as this year's super combative rider ðŸ‘
— Israel – Premier Tech (@IsraelPremTech) May 28, 2023
Absolutely undisputed!
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Thibaut Pinot en bleu, mais sans victoire d'étape
Côté français, le grand animateur du Tour d'Italie est sans conteste Thibaut Pinot. Comme à son habitude, il nous a offert des moments d'émotions dont il a le secret et sera passé par deux fois juste à côté de la victoire d'étape. Comme trois autres fois cette saison. Le style Pinot est à l'image de son directeur Marc Madiot, flamboyant et à l'instinct. C'est ce qu'on aime en tant que spectateur. Mais pour décrocher une victoire d'étape, il fallait sans doute être plus calculateur. Certainement lors de la 13e étape où il semblait être le plus fort, mais a préféré s'assurer de faire perdre Alexander Cepeda (EF Education-EasyPost), quitte à laisser la victoire à Einer Rubio (Movistar Team). Lors de la 18e étape, Filippo Zana (Jayco - AlUla) était costaud, mais Pinot a préféré faire le tempo en tête tout au long de la dernière ascension pour reprendre du temps au classement général, mettant en péril ses chances de victoire d'étape. Au final, il terminera 5e du général et décroche le maillot bleu de meilleur grimpeur, ce qui est un très beau bilan pour le Français. On regrettera juste qu'il n'y ait pas eu cette victoire d'étape comme cerise sur ce beau gâteau.
La jeunesse éclabousse le Giro
On a déjà évoqué en long et en large l'explosion de Derek Gee. Mais d'autres jeunes coureurs se sont mis en évidence à l'occasion de ce 106e Tour d'Italie. Tout d'abord, Jonathan Milan qui décroche le maillot cyclamen de meilleur sprinteur avec une victoire d'étape et 4 deuxième places. On regrettera l'abandon de Mads Pedersen qui nous a privé d'une véritable lutte pour le classement par points. On se souvient bien entendu Ben Healy (EF Education - EasyPost), révélation des classiques ardennaises et concurrent le plus féroce pour Thibaut Pinot dans la lutte pour le maillot de meilleur grimpeur. Sans complexes, l'Irlandais a réussi une échappée monstre de 50 kilomètres lors de la 8e étape pour décrocher la victoire avec près de 2 minutes d'avance sur son plus proche poursuivant.
Ben Healy! That was some way to take your first-ever grand tour stage win. pic.twitter.com/QUNxVYhw6m
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Au niveau du classement général, on n'oublie pas côté français les deux journées en rose de Bruno Armirail (Groupama - FDJ). Le natif de Bagnères-de-Bigorre, habitué du rôle de l'ombre, aura passé quelques moments sous le feu des projecteurs. Une jolie histoire comme seuls les Grands Tours peuvent nous offrir. Chapeau l'artiste ! Enfin, on soulignera la très belle performance d'Eddie Dunbar (Jayco - AlUla). Il termine finalement à la 7e place du classement général pour sa première en tant que leader au sein d'une équipe. Et cela alors que sa préparation avait été loin d'être idéale, avec une fracture de la main en février. Une belle promesse pour le futur !
Le Grand Chelem des Danois
À l'entame du Tour d'Italie le samedi 8 mai, six coureurs pouvaient réaliser le Grand Chelem, c'est-à-dire remporter une victoire d'étape dans les 3 Grands Tours. Côté français, seul Warren Barguil (Team Arkéa - Samsic) pouvait réaliser cet exploit. Simon Clarke est passé tout près lors de la 6e étape, repris par le peloton à 200m de la ligne alors qu'il était échappé en compagnie d'Alessandro De Marchi (Jayco - AlUla) et que l'on pensait que la victoire se jouerait entre les deux hommes. Bauke Mollema (Trek - Segafredo) et Sepp Kuss (Jumbo - Visma) n'ont pas réussi non plus à lever les bras. Mais deux coureurs l'ont fait ! Il s'agit des Danois Mads Pedersen (Trek - Segafredo) et Magnus Cort (EF Education - EasyPost). Ce qui est encore plus remarquable dans le chef de l'ancien champion du monde, c'est qu'il a réalisé cette performance en seulement 301 jours, après ses victoires sur le Tour de France et la Vuelta en 2022. Ils sont ainsi devenus les 104e et 105e coureurs à réaliser cet exploit.
Smile if you're a Dane with a grand tour grand slam 🇩🇰😠pic.twitter.com/lp7xmPaSWU
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Le Tour d'Italie gagné grâce à des composants... de gravel ?!
Le renversement de situation que nous avons vécu lors du contre-la-montre final du Tour d'Italie était grandiose. Mais est-il dû - en partie - à une trouvaille technique de génie de la part de l'équipe Jumbo - Visma ? En effet, à la fois lors de la 19e étape pour l'arrivée au sommet de Tre Cime di Lavaredo et ses pentes à près de 15% et lors du chrono du Monte Lussari où l'inclinaison moyenne était de plus de 12%, Primoz Roglic a utilisé un mono plateau de 40 dents combiné à une cassette arrière 10-44. Un setup que l'on utilise habituellement sur des vélos de gravel ou de VTT ! Ce choix était sans doute assez risqué, cela s'est vérifié avec le saut de chaine subi par Primoz Roglic, et qui semble d'ailleurs avoir été le seul coureur (?) dans ce cas. Mais le risque se sera avéré payant et cette configuration spéciale aura sans doute été un des éléments décisifs dans la remontée fantastique du Slovène !
🇮🇹 #Giro
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A �'🇮 path to heaven. pic.twitter.com/sCkUuxLo7D
Un Tour d'Italie globalement peu spectaculaire mais sauvé par son chrono final
Pour conclure, il faut admettre que ce 106e Giro nous laisse un petit goût de trop peu au niveau de la lutte entre les favoris. Heureusement, le chrono final restera dans les annales et "sauve" en quelque sorte la course à ce niveau-là. Les abandons trop précoces de Remco Evenepoel, Tao Geoghegan Hart ou Aleksandr Vlasov n'ont sans doute pas poussé les coureurs de classement à prendre des risques, chacun se trouvant à une place où il n'envisageait pas forcément de se retrouver avant le début du Giro. Le Tour d'Italie aura donc fait la part belle aux attaquants et permis à de nombreux coureurs de décrocher leur premier bouquet en Grand Tour. Et puis, il se sera terminé sur une belle histoire, qui aura vu Geraint Thomas se transformer en poisson-pilote pour aider son ami Marc Cavendish (Astana - Qazaqstan) à remporter un ultime bouquet sur le Giro.
Well, if I couldn’t win, I thought I might as well try and help an old mate out. Call it an early retirement pressie @MarkCavendish 🤣 Chapeau mate 👌 #Giropic.twitter.com/MGZ4LFO1kv
— Geraint Thomas (@GeraintThomas86) May 28, 2023
Désormais, nos regards se portent sur le Tour de France qui débutera dans un petit mois déjà à Bilbao. On y attend un duel aussi passionnant que l'année dernière entre Tadej Pogacar (UAE Team Emirates) - que l'on espère totalement remis de ses blessures - et Jonas Vingegaard (Jumbo - Visma), arbitré par David Gaudu (Groupama - FDJ), Enric Mas (Movistar) et Mikel Landa (Bahrain - Victorious).
