Tour de France - Bernard Hinault : «Les Français, ils doivent oser !»
Par Clément LABAT-GEST le 13/07/2022 à 13:45
Tadej Pogacar, Primoz Roglic, les Français, le Covid... Bernard Hinault a fait le point sur la 109e édition du Tour de France à l'occasion de la deuxième journée de repos, ce lundi. Avec son franc-parler habituel, le quintuple vainqueur de la Grande Boucle (1978, 1979, 1981, 1982, 1985) est revenu sur de nombreux sujets avant de livrer son pronostic pour le podium final. "Pour moi, il y a Pogacar tout en haut, et après, les deux autres, je n'en sais rien. La seule manière de le battre, c'est de l'attaquer. C'est lui qui a les clés en main actuellement. Il l'a montré avec ses différents numéros, il s'amuse", a-t-il expliqué au micro de Cyclism'Actu.
Vidéo - Bernard Hinault est le parrain du Tour de l'Avenir
"Le Tour de l'Avenir, c'est génial !"
Mais avant d'aborder l'actualité du Tour, le "Blaireau" était également présent pour la présentation du parcours de la 58e édition du Tour de l'Avenir (18-28 août), épreuve dont il est le parrain officiel. "Mon rôle, c'est un rôle de communication avec les personnalités qui nous accueillent, comme les maires. On discute de tout, de vélo... Et puis tous les jours, j'ai trois invités avec moi dans la voiture. J'essaye de leur faire partager un grand moment". Le parcours s'étendra de la Roche-Sur-Yon, en Vendée, jusqu'aux Alpes. "C'est un beau parcours. Les coureurs auront de quoi s'exprimer à tous les niveaux. Les sprinteurs et les baroudeurs pourront s'amuser jusqu'au pied des Alpes, avant de laisser la place aux grimpeurs", raconte-t-il.
Le potentiel futur vainqueur du Tour de France y prendra-t-il part ? "Peut-être ! On en a déjà eu quelques-uns, entre Bernal, Quintana - bien présent même s'il n'a pas gagné le Tour - et bien sûr Pogacar aujourd'hui. Le terme "Tour de l'Avenir" veut tout dire : des jeunes de moins de 23 ans, avec beaucoup de nationalités... C'est génial ! Parce qu'on voit et découvre des coureurs qu'on ne connaît pas, et on se dit "Mais d'où il sort celui-là ?". Et après on les retrouve chez les professionnels".
Suite à la conférence de presse du jour à Morzine dans le cadre de la journée de repos du @LeTour retrouvez les profils de l'édition 2022 du Tour de l'Avenir qui s'élancera le 18 août de @larochesuryonfr et se terminera le 28 août à Villaroger. pic.twitter.com/BB2h9L0gHr
— Tour de l'Avenir (@tourdelavenir) July 11, 2022
"On ne veut pas voir partir les coureurs juste à cause d'une cochonnerie qui traîne dans le peloton"
Alors que le Covid était au centre de toutes les inquiétudes pour cette journée de repos, tous les coureurs ont finalement été testés négatifs. "Je suis soulagé, comme tout le monde. On a pas envie de voir disparaître les coureurs les uns après les autres juste à cause d'une cochonnerie qui traîne dans le peloton. Maintenant, ce n'est pas parce qu'il n'y en a pas aujourd'hui, qu'il n'y en aura pas demain. C'est ça le problème avec le Covid : on peut être sûr des résultats dans l'immédiat, mais trois jours après vous pouvez tout aussi bien être contaminé", tempère Bernard Hinault.
"INEOS, s'ils veulent faire 3-4-5... C'est très bien, qu'ils continuent comme ça"
Grand favori à sa propre succession, Tadej Pogacar (UAE Team Emirates) impressionne mais n'a pas encore écrasé le Tour avec ses 39" d'avance sur Jonas Vingegaard (Jumbo-Visma). "Il a quand même bien la mainmise dessus. Déjà, dès le prologue, il fait troisième. Je pense qu'il a pris des risques, il avait vraiment envie d'être bien présent. A la Planche des Belles Filles, il n'a pas fait de cadeau, il est vraiment là. Et encore à Lausanne (samedi), il se bat pour prendre quelques bonfifications... Il n'a peut-être pas encore assommé le Tour, mais la question, c'est surtout "Qui y'a-t-il en face de lui ?". Le problème est là aujourd'hui pour moi".
"Jumbo-Visma a Vingegaard et Roglic. Roglic est déjà à 2'30", il faut qu'il attaque de loin et qu'il n'ait pas peur. C'est le seul moyen de mettre en difficulté Pogacar. C'est pareil pour INEOS, avec trois coureurs. S'ils veulent faire 3-4-5, très bien, qu'ils continuent comme ça. Mais s'ils veulent le déboulonner de son piédestal, il n'y a pas 36 solutions. Il faut aller le chercher en l'attaquant chacun leur tour. Pour gagner le Tour, il faut savoir le perdre. C'est la seule solution pour eux. Et pour Pogacar, son seul moyen d'éviter de se faire attaquer de tous les côtés, c'est de les attaquer lui-même, et de les mettre à genoux pour en terminer", explique l'ancien champion du haut de ses 67 ans.
"Les Français doivent oser ! En gagnant le 14 juillet à l'Alpes d'Huez, on s'en rappellera à vie"
Les Français sont bien placés au général, avec Gaudu et Bardet respectivement 5 et 6e. Est-ce bon signe ? "Pour moi, 5 ou 6e, ce n'est déjà pas intéressant. En voulant se battre spécialement pour rester dans les cinq premiers, il se peut très bien qu'ils se prennent un éclat. Il vaut mieux essayer d'aller chercher des étapes, je crois que ce serait aussi bien. En gagnant le 14 juillet à l'Alpe d'Huez, on s'en rappellera à vie. C'est mieux qu'un top 10. Personne ne sait qui était 10e l'an passé, donc c'est bien plus important de gagner des étapes".
Thibaut Pinot (Groupama-FDJ) a lui essayé dimanche, sans réussite. "Quand on l'écoute, il n'a pas osé suivre et a attendu qu'il y ait 2'30". Un tel écart, il faut le boucher. Tout seul, c'est pas évident. On voit qu'il marche bien. Mais il lui manquait ces 30" pour aller chercher Jungels. C'est comme ça. Il faut oser au risque de tout perdre. C'est sûr qu'il restait la vallée et 62 kilomètres... Mais il en a fait d'autres Pinot. Là, je ne sais pas. Si j'étais son directeur sportif, je lui aurais dit qu'il faut y aller direct et ne pas attendre. Dès que tu as la possibilité d'y aller, il faut le faire", avance un Bernard Hinault visiblement un brin agacé par l'attitude des coureurs tricolores. "Non ça ne m'agace pas, c'est leur problème, pas le mien", conclut-il.