ITW - Cédric Vasseur : «Jonas Vingegaard... c'est quand même décevant»

Par Nicolas GAUTHIER le 02/12/2022 à 10:45

ITW - Cédric Vasseur : «Jonas Vingegaard... c'est quand même décevant»
Photo : @Cyclismactu / @JumboVismaRoad

Cédric Vasseur au micro de Cyclism'Actu pour évoquer la saison 2022 de la Cofidis ! Et c'est avec un large sourire que le manager général de la formation nordiste parle de ce dernier exercice, les 19 victoires obtenues par ses protégés - dont plus de la moitié décrochée par le trio composé de Benjamin Thomas (4), Bryan Coquard et Axel Zingle (3) - la dixième place au classement UCI et le maintien en WorldTour le comblant... même s'il aurait certainement échangé quelques succès contre une étape du Tour de France. Guillaume Martin, l'équipe féminine, sa vison sur la saison cycliste qui vient de se conclure... Cédric Vasseur a également abordé de nombreux autres sujets pendant les 30 minutes qu'il nous a acccordés en ce début de semaine. Entretien.

Vidéo - Cédric Vasseur, le Boss de Cofidis au micro de Cyclism'Actu

 

"Nos recrues se sont tout de suite imposées comme étant des coureurs de top niveau"

Cédric Vasseur, 19 victoires en 2022 pour la Cofidis, avec 2 en WorldTour dont 1 en Grand Tour, et une dixième place au classement UCI par équipes. Que vous inspirent ces statistiques ?

Je suis un manager ravi, c'est une saison excellente. Depuis notre passage en WorldTour, on n'a jamais cessé de progresser, et cette année, on intègre le top 10 mondial des équipes. Je suis donc comblé et j'ai vraiment hâte d'être en 2023.

 

On imagine que les prestations réalisées par les recrues 2022 (Benjamin Thomas, Bryan Coquard...) vous ravissent également ?

Le recrutement 2021-2022 a aussi été exceptionnel. D'entrée de jeu, on a senti Bryan (Coquard), Benjamin (Thomas) et Axel (Zingle), entre autres, donner une impulsion à l'équipe. Nos recrues se sont tout de suite imposées comme étant des coureurs de top niveau, et ça a permis à l'équipe monter aussi son niveau, ce qui donne finalement un top 10 au niveau mondial. On en est fiers.

 

Auriez-vous signé pour une telle saison en janvier dernier ?

Absolument. J'aurais peut-être ajouté une victoire d'étape sur les routes du Tour de France. Mais hormis cette frustration, avec un Benjamin Thomas repris à 200 mètres de la ligne à Carcassonne, la saison a été vraiment excellente. J'espère qu'on sera capable de rééditer cet exploit en 2023, voire peut-être faire mieux, car on est convaincus, avec l'effectif qui est le nôtre, qu'on n'est pas encore le pied au plancher, qu'on n'est pas à 100%. On pense donc qu'on doit faire encore mieux l'année prochaine.

 

"Gagner sur le Tour ? Je suis persuadé que ça va finir par sourire"

Et aller enfin chercher cette victoire d'étape sur le Tour de France qui vous manque cruellement depuis près de 15 ans maintenant (Sylvain Chavanel en 2008) ?

C'est vrai que ça en devient une obsession. Maintenant, avant mon arrivée au sein de l'équipe Cofidis, le seul coureur qui semblait être capable de gagner sur le Tour, c'était David Moncoutié. Aujourd'hui, avec Ion Izagirre, avec Simon Geschke, on a recruté des coureurs qui ont déjà gagné sur le Tour, et normalement, quand on a été capable de frapper sur les routes du Tour, on est capable de rééditer cet exploit. J'ai bon espoir que ces coureurs puissent montrer la voie à nos jeunes talents. Victor Lafay a gagné l'an dernier sur le Giro, Jesus Herrada a gagné cette année sur La Vuelta, donc on se dit qu'on a bientôt rendez-vous avec l'histoire en renouant avec le succès sur le Tour. Je suis persuadé que ça va finir par sourire.

 

"Il n'y aura qu'un seul Grand Tour pour Guillaume Martin en 2023, c'est le Tour de France"

Comment jugez-vous la saison de Guillaume Martin ?

Guillaume, ça reste une valeur sûre et notre leader. Depuis quelques années, on avait pris le parti de le faire se mesurer aux cadors et il a enchaîné les rendez-vous de très grand niveau. Cette année, on avait besoin et envie de lui redonner confiance sur des courses de niveau inférieur et où il pouvait briller. En 2023, le but sera de le faire en monter en puissance jusqu'au Tour de France, qui sera son sommet de la saison. On a encore besoin d'affiner certaines choses, mais ce qui est d'ores et déjà clair dans sa tête et la nôtre, c'est qu'il n'y aura qu'un seul Grand Tour pour Guillaume Martin en 2023, c'est le Tour de France.

 

Parlez-nous en quelques mots d'Axel Zingle, qui a décroché trois victoires et qui a montré des qualités assez exceptionnelles cette année.

Axel, c'est un pur bonheur. Il nous a vraiment surpris cette année en grillant les étapes. Il va beaucoup plus vite que les autres, au sens propre comme au sens figuré, et il nous a tout simplement régalés. On veut maintenant construire un groupe autour de lui afin de l'amener encore un peu plus haut. 2023 doit être l'année de la confirmation pour lui. Je souhaite qu'il poursuive sa marche en avant, en mettant la barre toujours plus haut sur des courses d'un niveau plus important. C'est un coureur qui ira forcément un jour chercher un maillot de champion de France - on l'a vu cette année avec un podium pour sa première participation - et probablement des succès sur le Tour de France. Après, on ne veut pas lui mettre une pression de folie sur les épaules, il faut qu'il continue à prendre du plaisir et à se découvrir.

 

"Certaines équipes ont essayé de nous piquer Guillaume Martin, Benjamin Thomas... c'est la guerre"

La saison 2022 vous a permis de garder votre place en WorldTour (14e sur le classement des trois dernières saisons). Vous qui avez bataillé toute la saison pour vous maintenir, comment jugez-vous ce système mis en place par l'UCI et qui a été largement critiqués par certains acteurs du cyclisme, dont Sylvan Adams, le propriétaire d'Israel-Premier Tech, et Jonathan Vaughters, le manager général d'EF Education-EasyPost ?

C'est un système stressant, mais quand on est dans le sport de haut niveau, il y a toujours une sélection qui s'opère. Mais je pense que ce qui a vraiment gêné avec ce système de montées-descentes, c'est l'inégalité liée au Covid, avec des équipes plus ou moins touchées et des équipes qui jouaient plus ou moins le jeu. Quand on est dans un jeu où on ne maîtrise pas certaines choses, et notamment le Covid, ça sème le trouble.

 

2023, c'est déjà demain, et contrairement à 2021 et 2022, la Cofidis s'est montrée assez sage sur le marché des transferts, avec seulement quatre arrivées (Jonathan Lastra, Harrison Wood, Axel Mariault et Christophe Noppe), misant ainsi sur la stabilité et la continuité.

Absolument. Le mot, c'est la confiance. On a notamment renouvelé les contrats de Guillaume Martin et de Ion Izagirre (2023 et 2024), et on ne voulait surtout pas voir partir les coureurs qui nous ont permis cette saison d'obtenir la dixième place au classement UCI. C'était une volonté commune, donc on s'est battus pour les garder. Ça n'a pas été facile de les conserver - certaines équipes ont essayé de nous piquer Guillaume Martin, Benjamin Thomas... c'est la guerre, mais j'aime ça - mais on est fiers de pouvoir continuer avec cette équipe. Et puis travailler dans la stabilité, ça permet de gagner du temps. On connaît le mode de fonctionnement des uns et des autres, on connaît leurs forces et leurs faiblesses, et j'ai vraiment l'intime conviction qu'avec ce même effectif, on se retrouvera fin 2023 avec des résultats qui seront encore meilleurs.

La prolongation de Guillaume Martin : "Il avait besoin d'être rassuré sur certains points"

Et comment avez-vous convaincu un Guillaume Martin de rester chez Cofidis ?

Notre volonté était d'offrir une place de leader à Guillaume, de lui permettre de choisir son programme et son équipe. On a fait venir des coureurs pour lui, et je crois que quand quelqu'un se sent bien dans une équipe et qu'il sent que cette dernière progresse, il se dit tout simplement qu'il faut miser sur la stabilité. On a beaucoup discuté, il avait besoin d'être rassuré sur certains points... et je pense qu'on l'a rassuré sur ses points d'interrogation.

 

Chez Cofidis, il y a une équipe masculine, mais il y a aussi une équipe féminine, et cette année s'est plutôt bien passée...

C'était un challenge fort, qu'il fallait relever. C'était le saut dans l'inconnu pour nous. On a 26 ans d'expérience dans le sport cyclisme masculin, avec notre mode de fonctionnement, mais là on plongeait vraiment dans un univers qu'on ne connaissait pas. On a fait une totale confiance à Gaël Le Bellec, qui dirige l'équipe avec Arthur Quilliec, et ils font du très bon travail. Ça a été une année de découverte, on a pris beaucoup de plaisir.

On n'avait pas forcément mis l'accent sur la performance, sur les résultats, mais j'espère que sera un peu plus le cas l'année prochaine, qu'on sera capable d'intégrer le top 20 des équipes (la Cofidis Women Team a terminé 2022 au 28e rang, ndlr) et d'avoir un peu plus de constance. Pour cela, on a renforcé l'équipe, en passant de 11 à 13 athlètes et en recrutant des coureuses avec d'autres capacités (Morgane Coston, Spela Kern, Josie Talbot et Flavie Boulais). Je pense que le groupe 2023 est plus fort que celui de 2022, donc j'espère que, comme l'équipe masculine, les fielles mettront la barre un peu plus haut chaque année.

 

"Quand on gagne le Tour et qu'on ne fait qu'une ou deux apparitions après, on n'aide pas le cyclisme"

En tant qu'ancien consultant et amoureux du cyclisme, y a-t-il un champion ou un moment qui vous a particulièrement marqué en 2022 ?

Remco Evenepoel. Ce qu'il a fait aux Championnats du monde... Je suis émerveillé par ses performances. J'ai aussi beaucoup apprécié le duel Jumbo / Jonas Vingegaard contre Tadej Pogacar tout seul. Si j'avais été à l'antenne en tant que consultant, je me serais demandé pourquoi Pogacar bougeait sur Roglic alors qu'on voyait que Roglic était sur la pente descendante. Je pense qu'il a pêché par orgueil. En tout cas, on a eu une superbe passe d'armes sur les routes du Tour de France, avec certainement une belle revanche l'année prochaine.

Après, Vingegaard, c'est quand même décevant selon moi car quand on gagne le Tour de France et qu'on ne fait qu'une ou deux apparitions après le Tour, on n'aide pas le cyclisme. Je suis venu au vélo parce que j'admirais Bernard Hinault, et Bernard Hinault, après le Tour de France, il ne partait pas en stage, en vacances ou il ne disparaissait pas des radars pendant cinq semaines. On ne peut pas avoir de personnages charismatiques s'ils ne font plus l'actualité. C'est aussi là que je tire mon chapeau à Remco Evenepoel, qui a fait le show jusqu'aux Mondiaux. Quand on voit comment il se débarrasse de Lutsenko sans même attaquer et le faisant péter de la roue... je crois qu'on a vraiment une pépite du cyclisme et je fais confiance à Patrick Lefevere pour bien le gérer. En tout cas, ce serait bien de le voir l'année prochaine sur les routes du Tour de France se battre avec Pogacar et Vingegaard.

 

"Le Tour de France, c'est un beau challenge pour Evenepoel"

Selon Cédric Vasseur, c'est qui le plus fort entre Pogacar et Evenepoel ?

Sur le Tour de France, je pense que c'est encore Pogacar. Il y a plein de coureurs qui ont brillé sur le Giro et La Vuelta mais qui ont échoué sur le Tour. C'est quand même un autre monde. C'est donc un beau challenge pour Evenepoel, mais aujourd'hui, je donne quand même un avantage à Pogacar. Il aura beaucoup appris de son échec de 2022 et qu'il aura soif de revanche.

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