Route - Mard Madiot : «On est capable de gagner sur tous les terrains»

Par Titouan LABOURIE le 24/11/2023 à 16:43. Mis à jour le 25/12/2023 à 18:08.
Route - Mard Madiot : «On est capable de gagner sur tous les terrains»
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Photo : @Cyclismactu / CyclismActu.net

La formation Groupama-FDJ a vécu une saison 2023 mouvementée. On peut noter la belle 2e place de David Gaudu sur Paris-Nice, la 5e place et le maillot bleu de Thibaut Pinot sur le Giro ou encore les succès de Valentin Madouas sur les Championnats de France et sur la Bretagne Classic. Même si l'on peut aussi souligner un Tour de France quelque peu décevant, le départ houleux d'Arnaud Démare ou encore les adieux de Thibaut Pinot. Après cette année qui marque la fin d'une ère, la Groupama-FDJ espère réaliser une grande saison 2024. En plein préparatifs en vue de cette nouvelle année, le manager général de la formation française numéro un, Marc Madiot, a accordé une interview à Cyclism'Actu. Au cours de ce long entretien, il est revenu sur de nombreux sujets. Le bilan de la saison 2023, le mercato marqué par de nombreux départs, les objectifs pour 2024 et bien d'autres. Et c'est à regarder ou à lire ci-dessous !

Vidéo - Marc Madiot fait le bilan... au micro de Cyclism'Actu !

 

"C'est plutôt une bonne saison"

Premièrement, comment ça va et quelle est l’actualité chez Groupama-FDJ ?

Ça va bien. C'est la rentrée des classes, les coureurs ont repris l'entraînement. On est dans la phase de mise en place des différents matériels, de la préparation des stages... Le compte à rebours est déjà lancé pour les coureurs et l'encadrement. On est déjà en 2024.

 

Petit point comptable, en 2023 vous finissez 7e équipe au classement UCI, avec 19 victoires, ce qui est dans la moyenne habituelle de l’équipe, mais avec seulement 2 succès en WorldTour, comment vous jugez cette saison ?

C'est plutôt une bonne saison, puisqu'au-delà des 19 victoires, il y a 30 places de 2e, dont 10 en WorldTour. Et quand on fait 2e derrière Tadej Pogacar sur Paris-Nice, on ne peut pas rougir. L'équipe a été présente, constante, tout au long de la saison. On va rétorquer que le Tour de France n'était pas au niveau de celui de l'année précédente, ce n'est pas faux, mais il n'était pas non plus catastrophique. Le bilan n'est pas exceptionnel, mais on est dans la bonne moyenne. On est quand même 7e équipe mondiale, ce qui démontre qu'on a été constent et régulier sur tous les terrains.

 

 

"Les Championnats de France ? Une vraie fierté, une vraie satisfaction"

Il y a eu les Championnats de France, la Bretagne Classic… Sur le point de vue sportif, en tant que manager, quel a été votre moment fort de la saison ?

A titre personnel, de manière sentimentale, j'ai un faible pour le Championnat de France. On l'a dominé de la tête et des épaules, on avait vraiment une belle cohésion, une grande force collective. C'était une vraie fierté, une vraie satisfaction.

 

Comment vous jugez votre bilan sur les Grands Tours, il y a ce maillot bleu et cette 5e place de Thibaut Pinot sur le Giro, puis il y a eu le Tour de France que beaucoup ont jugé décevant avec la 9e place de David Gaudu, et La Vuelta avec les jeunes pousses et Lenny Martinez qui a porté le maillot rouge ?

C'est quand même assez correct. On a eu des maillots de leader à peu près partout. Peut-être que le Tour de France est le point un petit peu faible de l'année, mais je suis confiant, on va rétablir ça dans l'année qui arrive. Globalement, l'équipe était à un bon niveau.

 

 

"C'est l'époque Démare-Pinot qui se termine"

Cette année a aussi marqué un tournant dans l’histoire de votre équipe avec les pertes de Thibaut Pinot, Arnaud Démare, Mathieu Ladagnous, Bruno Armirail… c’est une véritable page qui se tourne chez Groupama-FDJ

Oui, le temps passe, les années s'enchaînent, se succèdent. La preuve, Thibaut a passé 14 années avec nous et on ne les a pas vu passer. Il faut anticiper et la vie est un éternel recommencement. Des coureurs partent, d'autres arrivent, ainsi va la vie d'une équipe sportive. Je suis quand même là depuis un bon nombre d'années, donc progressivement et successivement les effectifs évoluent et bougent. Je me souviens encore de l'époque Sandy Casar, Jacky Durand, Bradley McGee et autres. Aujourd'hui, c'est l'époque Démare-Pinot qui se termine. Maintenant on a les David Gaudu, Valentin Madouas, Romain Grégoire, Lenny Martinez... qui s'installent.

 

 

"Arnaud Démare ? J'espère qu'on aura l'occasion de discuter tranquillement"

Ça fait maintenant plusieurs mois que "l’affaire" Arnaud Démare a eu lieu, avec du recul, qu’est ce qui a mené à cette situation et avez vous des regrets ?

La vie est ainsi faite, on se retrouve avec des choix à effectuer. Des choix d'un niveau sportif et économique. C'est sûr que quand tout se passe bien, on peut réguler la situation pour l'intérêt de tous, c'est formidable. Mais, malheureusement, il y a parfois des moments où c'est difficile à réaliser, on a des contraintes. Arnaud avait aussi des attentes que l'on n'a pas pû combler, mais ça c'est la vie économique d'une équipe, il faut faire avec. Je suis triste et déçu que la relation se soit un peu abîmée avec ce moment délicat avec lui. Mais je reconnais son talent, je sais tout ce qu'il a apporté à l'équipe et j'espère qu'on retrouvera une relation apaisée et tranquille avec le temps qui va s'écouler.

C'est une situation que l'on avait peu connue jusqu'à maintenant et que l'on commence à rencontrer. Aujourd'hui, on est face à des équipes mastodontes, qui n'ont pas de limites de budget, qui influencent le marché en terme de contrats. Donc on doit faire des arbitrages et on se retrouve dans des situations délicates. A partir du moment où on ne joue pas dans la même catégorie que INEOS Grenadiers, UAE Team Emirates ou Jumbo-Visma, qui ont plus du double de notre budget, qui n'ont pas les mêmes contraintes... ça complique la situation.

 

Depuis le départ d'Arnaud Démare, est-ce que vous avez eu des contacts avec lui ?

Je n'ai pas eu de contact avec lui, mais je sais que j'en aurai à un moment ou à un autre. J'espère qu'on aura l'occasion de discuter tranquillement.

 

 

"Il a fallu attendre sa dernière année pour qu'on comprenne qui était Thibaut Pinot"

Pour Thibaut Pinot, ça s’est passé différemment, dans de bien meilleures conditions, il a eu la sortie qu’il méritait. Qu’est-ce que vous retenez de sa carrière au sein de votre équipe ?

Il a été un coureur emblématique, important, une clé de voûte dans l'équipe. Il nous a beaucoup apporté, l'équipe a grandi avec lui et Arnaud. Donc merci et bonne route pour la suite, une nouvelle vie commence pour lui. Je trouve que ce qu'il s'est passé dans les derniers moments reflète ce qu'a été Pinot pendant toute sa carrière. Il a fallu attendre sa dernière année pour qu'on comprenne qui était Thibaut Pinot et l'emprunte qu'il laisse au sein du peloton et au sein de la vie cycliste en France. Il a eu la sortie qu'il méritait.

 

 

"En France, il y a quand même 4 formations en WorldTour, ce qui crée une sorte d'inflation"

En plus de Pinot, Démare, Ladagnous et Armirail dont on a déjà évoqué les cas, vous perdez également d’autres coureurs importants avec Michael Storer, Miles Scotson, Jake Stewart et Bram Welten. De l’autre côté, il y a Cyril Barthe, Sven Erik Bystrom, Eddy Le Huitouze, Rémy Rochas, Clément Russo, Marc Sarreau et Matthew Walls qui arrivent. Comment vous jugez votre mercato ?

On est une équipe qui n'a pas l'habitude de défrayer la chronique en terme de mercato. Si vous regardez ce qu'on a pu réaliser sur toutes les dernières années, il n'y a jamais de grand chambardement, on ne sort pas forcément le carnet de chèques pour aller chercher de grosses pointures. C'est des transitions linéaires et normales qui s'effectuent au sein de l'équipe. Il y a des arrivées, des départs, des gens qui souhaitent aller explorer ce qui peut se passer ailleurs. On a un groupe qui devrait être opérationnel d'entrée de jeu et on a un potentiel très intéressant. Les noms sont peut-être moins ronflants qu'en 2023, mais à nous de progresser avec nos coureurs. Je suis assez confiant et optimiste pour que tout se passe bien au court de la saison qui arrive, je n'ai pas d'inquiétude particulière.

 

Est-ce que vous comprenez la déception de vos supporters, qui se sont beaucoup exprimés dans ce sens-là sur les réseaux sociaux ?

Je comprends que quand on est observateur ou supporter, on rêve toujours de retrouver des noms connus. C'est un peu comme en foot, on attend des stars. Mais ce n'est pas notre ligne politique et ça ne rentre pas dans nos moyens. On est aussi confronté à une concurrence qui est très bien armée. En plus, en France, il y a quand même 4 formations en WorldTour, ce qui crée une sorte d'inflation. Tout cela fait que la barre est de plus en plus haute. Mais je suis persuadé qu'avec l'effectif que l'on a, même si les noms sont moins connus, qu'on sera dans l'allure tout au long de l'année.

 

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"Compte tenu de l'âge et du potentiel qu'ils ont..."

Est-ce qu’il y a aussi eu cette logique de préserver une partie du budget afin d’être compétitif pour essayer de prolonger Lenny Martinez et Romain Grégoire, qui sont en fin de contrat en 2024 ?

Non, on fait notre mercato année par année, en fonction de nos moyens, en fonction de nos attentes et de nos besoins.

 

Lenny Martinez et Romain Grégoire, comment vous jugez leur première année avec la WorldTour ?

Pour ces deux-là, comme pour les autres qui viennent de la Conti, ils ont plutôt bien réussi, ils ont gagné des courses, ils ont porté des maillots de leader... Laurence Pithie a gagné Cholet - Pays de la loire, Lewis Askey a terminé 2e de Paris-Tours... je suis satisfait de leur intégration et de leurs débuts en WorldTour. Ils ont encore besoin de prendre un peu de puissance et d'endurance, mais c'est à peu près sûr qu'ils vont performer dans l'année qui arrive.

 

Avec le départ de certaines de vos têtes d’affiche, qu’est ce que vous attendez d’eux en 2024 ?

Compte tenu de l'âge et du potentiel qu'ils ont, on peut s'attendre à de très belles performances et à de gros résultats de leur part très rapidement.

 

"Je suis persuadé que David Gaudu va faire une très belle saison"

Après un gros début de saison 2023, David Gaudu a eu plus de mal sur la 2e partie de l'année, comment vous jugez sa saison ?

Il a eu une belle première partie de saison, largement au-dessus de ce qu'il avait réalisé les années précédentes. Le Tour de France n'était pas catastrophique, mais pas non plus exceptionnel. Tout en n'étant pas super, il a tout de même réussi à terminer dans le top 10 et premier Français. Ça montre que quand il est à 100%, il peut jouer à un très très au niveau et, à l'inverse, même s'il n'est pas au top, il est quand même présent. Donc il y a une certaine stabilité de niveau chez lui qui nous permet de se tourner vers 2024 avec un certain nombre de certitudes et de confiance. Je suis persuadé qu'il va faire une très belle saison.

 

Quels seront ses objectifs en 2024 ? On l’a beaucoup entendu parler du Giro, est ce que c’est une possibilité ?

On n'a pas encore fixé les programmes, mais si on regarde bien, le Tour d'Italie est quand même moins montagneux que les années précédentes, donc ce n'est pas forcément là qu'on va se diriger en premier. Mais on n'a pas encore fait les programmes et on va s'y projeter pendant le stage à Calpe. Il est clair que l'ensemble de l'équipe a envie de faire une grande saison avec un point d'orgue sur le Tour de France.

 

Quels sont les prochains rendez-vous ? Et qu’est-ce que l'on peut vous souhaiter ?

On a le stage à Calpe en décembre, la présentation de l'équipe début janvier, de nouveau des stages, l'Australie en parallèle et les courses vont s'enchaîner dès le GP La Marseillaise. On reste dans quelque chose de classique et de traditionnel. On peut nous souhaiter de gagner des courses, parce que le résumé de tout cela, ça reste de gagner des courses, de faire tourner le compteur. Pour moi, quand le compteur de victoires tourne, ça veut dire qu'on est opérationnel. Je pense qu'on est capable de gagner à tous les niveaux et sur tous les terrains, donc je suis confiant.

 

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