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Anthony Ravard : «On voit clairement que le cyclisme va mal...»

INTERVIEW
Mis à jour le par Nicolas GAUTHIER
Photo : @Cyclismactu / CyclismActu.net

Jeudi soir, au siège du CIC Ouest, s'est déroulée la soirée de fin de saison du CIC U Nantes Atlantique, l'une des sept équipes continentales françaises. Moins performante que lors de la saison 2023 (85e au classement UCI avec 365 points / 1 victoire contre 57e avec 712 points / 5 victoires l'an dernier), l'équipe nantaise a cependant connu quelques satisfactions, avec notamment ce magnifique doublé réalisé sur le Grand Prix de Plouay Élite grâce à ses deux hommes forts de l'année : Pierre-Henry Basset et Clément Braz Afonso. Pour revenir sur la troisième saison professionnelle du CIC U Nantes Atlantique - qui possède à côté de cela une magnifique académie et va devenir cet hiver le seul centre de formation agréé en France - Cyclism'Actu est allé à la rencontre d'Anthony Ravard, son manager général. Et s'il a bien sûr évoqué son équipe et ses coureurs, l'ancien sprinteur avait des choses à dire sur bien d'autres sujets liés au cyclisme, et notamment certains qui font l'actualité.

Anthony Ravard au micro de Cyclism'Actu !

 

"On a su malgré tout tenir le cap et rebondir"

Comment jugez-vous la saison 2024 du CIC U Nantes Atlantique ?

On avait très mal commencé l'année avec la chute de Yaël Joalland (lourdement tombé sur le Grand Prix Cycliste de Marseille La Marseillaise, ndlr), qui a impacté moralement certains coureurs. On a eu du mal à se remettre de ça, et en plus de cela, on a eu beaucoup de blessés différents et de maladies, avec notamment trois mononucléoses. Ça n'a donc pas été simple pour nous, et il y a donc eu un peu moins de résultats.

Le groupe était jeune (22 ans et demi de moyenne d'âge au début de la saison, ndlr), donc quand il y a des difficultés, c'est plus difficile à maîtriser, mais on a su malgré tout tenir le cap et rebondir puisqu'on a bien fini l'année. Il y a eu des révélations comme Clément Braz Afonso et Pierre-Henry Basset, qui ont fait le doublé au GP de Plouay Élite et vont rejoindre respectivement Groupama-FDJ et normalement Astana Qazaqstan selon les bruits que j'ai pour ce dernier. Notre vocation, c'est de former les futurs champions, donc ce sont des satisfactions. 

 

"On a pas mal de projets, mais il faut maintenant les partenaires qui y adhèrent"

Le projet du CIC U Nantes Atlantique est désormais entièrement tourné vers les jeunes ou vous pensez encore à faire signer des coureurs plus expérimentés, comme vous l'aviez fait en 2022 et 2023 avec Emmanuel Morin ou Pierre Barbier ?

On veut avoir un mélange entre des jeunes et des coureurs cadres, ces derniers étant là pour partager leur expérience et tenir la baraque. On est une équipe de développement qui un calendrier de courses ProSeries, de classe 1 et de classe 2, donc il faut tenir la saison, ce qui fait qu'on est obligé d'avoir des coureurs cadres. L'idée, c'est de trouver plus de moyens pour avoir un effectif plus dense et qui est diversifié.

 

En début de saison, vous nous parliez de cette volonté de monter en ProTeam, et pourquoi pas dès 2025. Qu'en est-il ?

Il faut avoir des projets, mais il faut aussi se donner le temps des projets, ce qui veut dire structurer et y aller étape par étape. On a vu que ce n'était pas possible cette année, donc on n'y est pas allé pour y aller. On voit bien aujourd'hui que le cyclisme est en difficulté, chez les amateurs mais aussi sur certaines organisations professionnelles, donc on maîtrise notre budget. L'idée, c'est d'avancer, mais étape par étape. On a aussi le cyclisme féminin qui nous attire. On a donc pas mal de projets, mais il faut maintenant les partenaires qui y adhèrent. Pour ce qui est de la Conti et d'un passage en ProTeam, on verra ça d'ici deux, trois ou quatre ans en fonction du paysage du cyclisme français. Il faudra un intérêt sportif, mais aussi un intérêt pour les partenaires en termes de visibilité.

 

"Les Conti fédérales ? Je suis contre... "

Les Conti fédérales voulues par la Fédération Française de Cyclisme (FFC), c'est quelque chose qui doit vous contrarier ou non ?

Oui, forcément. Je pense que la pyramide actuelle, au vu de la façon dont elle est construite, a tout son sens. Au CIC U Nantes Atlantique, on prend des coureurs au sein des DN1, et elles ont donc toute vocation d'exister. Il faut donc défendre leur intérêt, ce que j'ai fait en visio avec Michel Callot (le président de la FFC, ndlr). Selon moi, il faudrait un classement DN1 qui permettrait de récompenser ces équipes car on voit que c'est de plus en plus difficile pour elles, avec l'apparition des réserves des WorldTeams, d'aller sur les courses de classe 2. Les trois ou cinq premières de ce classement, il faudrait qu'elles soient prises d'office sur les courses de classes 2 auxquelles elles postulent.

Après, je suis aussi contre le projet des Conti fédérales pour la simple et bonne raison qu'il ne peut pas y avoir deux poids, deux mesures. En tant que Conti, on paye des charges patronales et sociales, donc si on a en face de nous et sur les mêmes courses des équipes qui n'ont pas à payer cela, nos partenaires vont se demander pourquoi on a demandé tant de budget pour cette course-là alors que les autres ont moins de budget. En France, c'est la Ligue Nationale de Cyclisme qui gère les équipes de 3e division (niveau Conti) et le professionnalisme, et il faut que ça reste comme ça.

 

Des équipes amateurs qui disparaissent, un Yvon Caër qui se montre très alarmiste dans une récente interview... Que pensez-vous de la situation actuelle du cyclisme français ?

On voit clairement que le cyclisme va mal. Il y a de moins en moins de licenciés, des clubs disparaissent, le sport qui passe en seconde zone au niveau des collectivités, et surtout des départements, qui ont d'autres contraintes et pourraient moins aider à l'organisation des compétitions cyclistes... avec tout ça, c'est clair qu'on est en danger. Des solutions ? Je pense qu'il y en a autour du Savoir Rouler à Vélo et de la Remise en selle.

Moi, à notre niveau et si on grandit, qu'on passe en ProTeam et qu'on a un bus, mon idée serait de pouvoir aller dans les clubs lors des prises de licence, arriver avec le bus, faire des animations... ce qui pourrait permettre d'avoir quelques licenciés supplémentaires. Ce sont des petites idées à notre échelle et sur notre territoire. On est obligé de trouver des idées et de mettre des choses en place pour continuer de faire évoluer notre sport. Je suis avant tout un passionné et j'aime mon sport, donc il m'arrive de ne pas dormir la nuit sur des sujets comme ça.

 

Un phénomène qui est aussi inquiétant pour le cyclisme et qui n'est clairement pas une bonne pub pour le vélo, et notamment auprès des parents, c'est la recrudescence des accidents en compétition constatée depuis plusieurs mois...

Il y a en effet de plus en plus de chutes graves ou mortelles, mais heureusement, en compétition, ça reste rare. Ce qui me fait le plus peur, c'est l'entraînement. Il faut se demander comment on peut faire pour que les jeunes puissent s'entraîner en sécurité. Est-ce que c'est sur des circuits fermés ? Ou des pistes cyclables, mais qui ne sont malheureusement pas toujours entretenues ? Il faut mettre des choses en place parce qu'il y a de plus en plus de véhicules, et c'est pour ça qu'il y a de plus en plus d'accidents.

 

"Comme un bon père de famille..."

Votre recrutement pour 2025 n'est semble-t-il pas terminé. Que pouvez-vous nous dire sur les annonces qui vont être faites ultérieurement ?

Dix coureurs sont sous contrat pour la saison prochaine et un onzième va bientôt sortir. Après, on est actuellement en renégociation avec des partenaires et on va voir à quel niveau on va être en termes de budget. Comme un bon père de famille, je ne vais pas dépenser tant que je ne sais pas combien on a à dépenser, donc c'est le budget qui va déterminer s'il y aura douze, treize ou quatorze coureurs dans l'effectif 2025. Ce qui est important également, c'est structurer autour des coureurs. C'est bien d'en avoir, mais il faut aussi avoir du staff et des moyens techniques, et on cherche aussi à évoluer au niveau de la performance.

Publié le par Nicolas GAUTHIER

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