ITW - Guiberteau : «Dumoulin est LE favori de La Vuelta»

 

Vidéo - Cinq jours pour gagner La Vuelta !

À la veille du long contre-la-montre individuel de La Vuelta qui pourrait permettre à Tom Dumoulin de reprendre le maillot rouge à Joaquim Rodriguez (Katusha), Christian Guiberteau revient pour Cyclism'Actu sur les performances de son coureur. Le directeur sportif français de l'équipe Giant-Alpecin ne le cache plus, Dumoulin peut gagner ce Tour d'Espagne ! Son nouveau statut, ses progrès, une potentielle victoire dans le Tour de France ? Guiberteau raconte Tom Dumoulin.

 

Christian, à cinq jours de l'arrivée du Tour d'Espagne, Tom Dumoulin est actuellement quatrième du classement général. L'objectif chez Giant-Alpecin maintenant, c'est de gagner La Vuelta ?

Au départ, nous sommes arrivés ici avec une certaine incertitude par rapport à Tom et sa chute sur le Tour de France. On avait hâte d'oberver son comportement et de voir comment il allait récupérer. Mais finalement sa forme s'est améliorée de jour en jour. La première semaine lui correspondait bien avec des arrivées pour puncheurs. De fil en aiguille comme on dit, on arrive aujourd'hui à la veille du chrono en très bonne position. C'est clair que maintenant, tout est permis ! On peut pourquoi pas penser au sacre suprême même si nous sommes conscients que beaucoup de choses peuvent arriver en troisième semaine d'un grand Tour. 

 

Est-il devenu LE favori de cette Vuelta ?

On ne peut pas dire le contraire. Aujourd'hui, c'est difficile de se cacher. On a essayé de le préserver un maximum. Cette question : "Fait-il partie des favoris", revenait assez rapidement dès la première semaine mais il fallait attendre d'avoir passé l'Ermita de Alba lundi pour savoir vraiment où le situer. C'est le moment où le "break" aurait pu se faire en faveur des purs grimpeurs et Tom a réussi à limiter les dégâts. Il a même fait beaucoup mieux que limiter puisqu'il arrive maintenant au contre-la-montre avec 1'51" de retard. En soi, c'est déjà un bel exploit. 

 

Il y a quinze jours, au départ de La Vuelta, vous vous attendiez à ce qu'il réalise une telle performance ?

Bien sûr que non. Vous m'auriez dit cela au départ de La Vuelta ce n'était pas évident. Il y avait beaucoup d'incertitudes par rapport à sa récupération de sa chute mais il s'est vraiment bien entraîné. On ne l'avait pas programé pour jouer le classement général, l'objectif c'était une victoire d'étape et aussi ce chrono qui arrivait après deux semaines de course. En tant que spécialiste, c'était son grand objectif à Puerto Banùs mais il a lutté tous les jours pour garder sa position. C'est un Tour d'Espagne parfait pour lui, il a franchi un nouveau palier. 

 

Et quand on voit sa forme actuelle et celle qu'il avait avant le Tour, il doit y avoir des regrets ? Il aurait pu faire un très bon Tour de France non ?

Le Tour était l'un de ses principaux objectifs de la saison surtout qu'il s'élançait chez lui, à Utrecht. Il était à 100% et sans cette chute nous aurions pu en toute logique espérer prendre le maillot jaune le soir de la montée de Huy. Mais c'est vélo... Tout a été remis en cause et c'est pour cela que nous l'avons ajouté à un autre programme pour la fin de saison. C'était important pour son développement de faire un grand Tour cette année. Le timming était court mais le staff médical l'a bien entouré et lui a permis de récupérer assez vite de sa fracture. Il s'est ensuite entraîné de façon très pointu et ç'a payé puisqu'il s'est présenté au départ en parfaite condition ou presque. 

 

Tout le monde s'attend à retrouver Dumoulin en rouge mercredi soir, et vous ? 

On peut évidement dire qu'en regardant les aptitudes de chacun sur les chronos, il reprendra le maillot rouge mercredi. Deux minutes à reprendre, c'est tout à fait possible sur le papier mais un autre paramètre doit être pris en compte. Tom est un coureur jeune et on arrive en troisième semaine, donc le paramètre fatigue est important. C'est l'inconnu pour nous, comment son corps va répondre ? En toute logique j'aurai tendance à vous répondre oui mais avec quelques incertitudes.

 

Et il reste des étapes difficiles derrière...

Tout à fait, la veille de l'arrivée à Madrid notamment. Il ne faut pas non plus occulter les paramètres de course. L'équipe n'est pas bâtie avec des purs grimpeurs même si je suis convaincu qu'après le chrono nous pourrons gérer au mieux. Il est vrai néanmoins que l'étape de samedi s'annonce compliquée. Les pourcentages ne sont pas aussi raides que ces jours derniers. Si le facteur numéro 1 en cette fin d'épreuve, la récupération, est de son côté, Tom peut passer.

 

Quel écart doit-il creuser sur le contre-la-montre pour avoir une marge suffisante, une minute ?

Oui, s'il prend trois minutes par rapport à ses plus proches poursuivants, ce serait idéal. Une marge d'une minute sur Aru et Rodriguez au sortir de ce contre-la-montre serait en effet une marge confortable. Nous l'espérons mais ce sont les jambes qui décideront.

 

C'est quand même une grosse progression de sa part. Vous qui l'avez vu évoluer depuis 2012, quels sont les domaines où il a effectué ses plus principaux progrès ?

Lorsque nous l'avons recruté, nous connaissions ses qualités contre-la-montre. On sait aussi par expérience qu'un bon coureur en chono peut faire de bons résultats dans les classements généraux. Donc il y a eu tout un travail avec les entraîneurs et son expert en nutrition pour l'amener au sommet. Il a démontré sur les courses d'une semaine comme le Tour de Suisse qu'il grimpait bienSes limites jusqu'alors, c'était vraiment l'enchaînement en haute montagne sur un grand Tour. Et il vient de franchir un palier physiquement et mentalement à ce niveau-là. C'est un jeune coureur qui n'est pas encore arrivé à maturité. Il peut et il va progresser.

 

Pour gagner le Tour de France un jour ?

C'est l'éternelle question (rires). S'il est capable de jouer le classement général sur une Vuelta... c'est tout à fait logique d'avoir des ambitions sur le Tour de France. 

 

Surtout si l'on regarde le plateau de départ du Tour d'Espagne cette année avec Froome, Quintana, Valverde, Aru... 

Voilà ! Il y avait un gros plateau au départ. Mais on sait que sur le Tour de France les favoris débarquent à 100%, alors qu'ici certains arrivent fatigués du Tour. On le voit bien cette année... Les leaders qui ont participé au Tour sont un peu moins performants à cause de la fatigue accumulée. Pour Tom, on va déjà voir comment il termine La Vuelta. Chaque chose en son temps. 

 

Christian, on se donne rendez-vous l'année prochaine sur le Tour avec la Giant et Tom Dumoulin ? 

J'espère. Vous savez, les contrats sont reconduits d'année en année à l'étranger. Je suis en discussion avec mon manager mais il faut d'abord terminer cette Vuelta de la plus belle des manières possible et nous échangerons après. 

 

Propos recueillis par Sam Myon pour Cyclism'Actu.

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