INTERVIEW - Stephen Delcourt : «Si on veut que le cyclisme passe un cap... »

Lors de la présentation de l'équipe FDJ-SUEZ le manager général de l'équipe Stephen Delcourt a évoqué sa fierté d'accueillir trois coureuses du top 10 mondial, à savoir Demi Vollering, Juliette Labous et Evita Muzic, au sein de son équipe. Il a également annoncé les objectifs pour la saison à venir : gagner un Monument et surtout le Tour de France Femmes avec Zwift. Mais il a aussi tenu à insister sur la nécessité d'engager un dialogue entre tous les acteurs du monde du cyclisme pour que ce sport passe un cap.
Vidéo - Stephen Delcourt a de grandes ambitions pour 2025
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Franchir un cap
Stephen, ça fait longtemps qu'on en parle, mais ça y est, on y est.
Oui, on y est sur cette 20e saison avec beaucoup d'ambition. Même si le début de saison est bien parti pour nous en Australie, on va arriver dans le cœur du sujet avec toutes ces belles courses qui vont arriver.
On s'était vu lors de la présentation du Tour, une fois qu'on y est vraiment là, on se dit quoi ?
Maintenant que Demi Vollering est officiellement sous nos couleurs c'est l'étape d'après. On a fait trois ans dans le top 5 mondial, mais il faut avouer qu'on se faisait quand même écraser par SD Worx et Lidl Trek. Maintenant, l'ambition est d'aller jouer contre eux. J'espère que le cyclisme féminin, et particulièrement notre équipe, on va être capables de jouer contre eux, d'être capables de rivaliser sur toutes les grandes courses et pas juste ramasser les miettes.
On se connaît depuis longtemps, si je vous dis que vous avez toujours rêvé de ce truc-là.
Je pense qu'on a toujours rêvé haut dans l'équipe, avec nos valeurs, avec notre ADN, mais on a toujours visé très haut. Peut-être trop haut à des moments et on nous a reproché d'aller trop vite, parce que le cyclisme féminin ne prenait pas. Clairement, aujourd'hui, notre sport est en train de prendre, il est encore très fragile et je pense qu'il faut être très vigilant là-dessus. Mais on a une équipe qui peut marquer l'histoire du cyclisme, du cyclisme pas que féminin, du cyclisme tout court.
"Ce sont trois femmes exceptionnelles"
Comment on gère une équipe à trois têtes ?
Très bien, honnêtement, humainement, elles sont géniales. Humainement, ce sont trois femmes exceptionnelles, hyper engagées, avec du caractère, mais qui vont dans le même sens. Elles veulent gagner, elles veulent attaquer ensemble, elles veulent passer des super moments. Je le vois en stage, elles passent des moments très simples ensemble. Elles vont courir ensemble, elles prennent un café ensemble, elles jouent à des jeux de cartes ensemble, elles regardent des séries ensemble.
Vous parlez du cyclisme féminin et de son évolution. On a l'impression que maintenant, il y a quand même chez les femmes comme chez les hommes, un sport à deux vitesses. Soit vous avez le budget et vous pouvez tout faire, soit vous galérez non ?
Oui, c'est sûr. C'est un peu comme chez les organisateurs, avec les petites organisations bénévoles qui ont du mal à trouver leur place. On ne doit pas oublier d'où on vient, donc on doit entraider tout le monde. Et je le dis, le cyclisme féminin, il faut qu'on emmène tout le monde, ne pas aller trop vite. On n'est pas là pour dire qu'il faut un Tour de France à trois semaines. On a la chance d'être dans les septs équipes qui y participent. On a fait les bons choix au bon moment. Mais ça peut aller très vite dans l'autre sens. Et surtout, j'aimerais qu'il y ait plus d'ententes entre les organisateurs et les équipes, parce qu'aujourd'hui, on est en train de tous se diviser.
Bretagne Ladies Tour, par exemple, qui s'arrête c'est un coup de frein pour l'évolution du cyclisme féminin ?
Oui, Bretagne, Ladies Tour, Tour de Normandie, deux courses françaises. qui s'arrêtent pour faute de moyens. Je trouve ça dommage, un an après les Jeux Olympiques qui ont été un tel succès de voir qu'il n'y a plus de moyens pour le sport et que l'héritage n'est pas là.
Ce serait quoi le message à faire passer du coup ?
Aujourd'hui, on doit tous se mettre autour de la table et arriver à trouver une solution commune. On doit être capable de partager ensemble. Partager nos idées, partager nos points de vue, partager les richesses. Aujourd'hui, si on veut que le cyclisme passe un cap, et je parle féminin et masculin, il faut qu'on soit capable de créer de la valeur. Il n'y aura pas de course sans coureurs. Il n'y aura pas de coureurs s'il n'y a pas derrière d'équipes pour les structurer. Donc on doit vraiment se mettre autour de la table et arrêter d'être égoïste. Ce qui s'est passé à Bessèges, ce n'est pas blanc ou noir. Aujourd'hui, on doit tous trouver une solution et c'est l'affaire de tous.