Chronique - Daniel Mangeas, ses 50e et derniers France : «Mon ADN... »

Par Arthur DE SMEDT le 17/06/2024 à 20:01. Mis à jour le 23/06/2024 à 06:46.
Chronique - Daniel Mangeas, ses 50e et derniers France : «Mon ADN... »
Chronique
Photo : @Cyclism'Actu / CyclismActu.net

Les Championnats de France de cyclisme sur route 2024 ont commencé depuis jeudi chez notre fidèle chroniqueur Daniel Mangeas, à Saint-Martin-de-Landelles, sur ses terres manchoises et dans son village... qui sont également ses 50e et derniers championnats derrière le micro. Le speaker le plus célèbre de France va tourner une belle page de sa carrière, et quel plus beau symbole que de le faire chez lui, 50 ans après ses débuts sur le Championnat de France amateurs à... Montpinchon, déjà dans la Manche. La boucle est bouclée, mais rassurez-vous, Daniel Mangeas n'a pas encore prévu de raccrocher. Son jubilé à domicile, ses souvenirs, son avenir, et bien sûr son avis d'expert sur l'aspect sportif et la course au maillot tricolore sur ce parcours qu'il connaît par coeur... Daniel Mangeas s'est confié à Cyclism'Actu dans une nouvelle chronique forcément un peu spéciale et qu'il a souhaité résumer par cette phrase : "Je ne sais pas si le travail est la santé, en revanche je sais que la passion, c'est la santé".

Vidéo - Daniel Mangeas, ses 50e et derniers France à domicile !

 

Daniel Mangeas, comme tu nous l'avais annoncé sur Cyclism'Actu fin 2023, ces Championnats de France 2024 à Saint-Martin-de-Landelles, chez toi, seront tes derniers derrière le micro. Tes 50e, 50 ans après tes débuts... un chiffre assez fou ! Ça ne te donne pas un peu le vertige ?

Je me dis surtout qu'un demi-siècle, ça passe très vite ! Je l'ai toujours dit, la passion est quelque chose qui demeure du début à la fin quand on est un vrai passionné. Ces 50 ans, c'est une pure coïncidence, car on avait plutôt postulé pour organiser les Championnats en 2023. Mais Cassel avait une candidature plus ancienne. On les a donc eus en 2024, et sur le coup je n'y avais pas pensé. Mais je me suis rappelé que j'avais fait mon premier Championnat de France il y a 50 ans, à Montpinchon, chez les amateurs. Le vainqueur était un coureur de Nice, Rachel Dard. Donc 50 ans après, je fais mes 50e France dans le même département, la Manche !

 

La boucle est donc bouclée... On se demande presque si le scénario n'a pas été écrit juste pour toi !

Et non, justement il n'a pas été écrit, mais je peux dire que les planètes se sont alignées. Et c'est génial ! D'autant plus que ça va être un moment historique, puisque c'est la première fois depuis la création des Championnats de France, en 1907, qu'ils seront organisés dans l'ex Basse-Normandie, regroupant les départements du Calvados, de la Manche et de l'Orne. Aucun de ces trois départements n'avait encore accueilli les Championnats professionnels. Le premier sera donc la Manche ! Et la coïncidence est double, puisque le seul Normand champion de France était de la Manche : c'est Raymond Delisle, sacré en 1969 à Soissons.

 

Revenons un peu sur tes débuts en 1974, il y a 50 ans. Comment en es-tu arrivé là ?

Et bien, il y avait Albert Bouvet, directeur adjoint du Tour de France et ancien champion Français, qui m'avait fait venir sur le Tour 1974 dans la voiture information, celle qui précède le peloton de 5-10 minutes. J'ai également commenté l'arrivée victorieuse de Raymond Poulidor au Pla d'Adet, lorsque le speaker est tombé en panne de voiture. J'ai aussi fait les départs de contre-la-montre. Et comme je suis Manchois, le club local et le comité des fêtes de Montpinchon m'ont proposé d'animer les Championnats de France amateurs, qui avaient lieu une semaine après l'arrivée du Tour.

Je garde un vrai souvenir de cette journée à Montpinchon, c'était un immense succès populaire, comme ce sera le cas du 20 au 23 juin. J'ai l'impression que c'était hier. Autant, quand ma femme m'envoie faire les courses, j'oublie la moitié des choses à ramener, autant les lieux que j'ai visités, les courses que j'ai commentées, je les garde au plus profond de ma mémoire.

 

Et à l'époque, tu imaginais encore commenter ces Championnats 50 ans plus tard ?

Pas du tout ! J'avais même répondu à un journaliste : "Oh, j'arrêterai à 50 ans". Et puis finalement, la passion... J'ai la chance d'avoir fait toute ma vie le métier que je rêvais de faire quand j'avais 3 ou 4 ans. Mes parents m'ont toujours dit que les premiers mots que j'ai dit après papa et maman, c'est "Bobic" et "Robet", les champions de l'époque. Je prenais un tube d'asprine vide, et je commentais avec à 3 ou 4 ans.

Donc en 1974, je ne pensais pas que je serais là 50 ans après. En revanche, avec Henry Pigeon, qui m'a un peu mis la main au micro, on avait l'idée qu'un jour on accueillerait bien les Championnats de France. C'est un rêve devenu réalité, 22 ans après avoir réalisé celui de recevoir le Tour de France, le 14 juillet 2002. Le bonheur que j'ai est partagé par tous les habitants du département de la Manche. C'est évidemment excitant, et en même temps angoissant, car on a tous envie de réussir la fête.

 

Justement, venons-en à ces fameux Championnats 2024 de Saint-Martin-de-Landelles. Tu sens la pression et l'engouement monter à quelques jours de cette fête ?

Tout à fait. Il y a 1 200 habitants dans ma petite commune, et 400 d'entre eux sont bénévoles. La ville est tapissée de drapeaux bleu-blanc-rouge depuis déjà 15 jours. La pression, je la sens monter. Gilbert Daniel, figure du cyclisme dans le Sud-Manche, est le président du comité d'organisation de ces championnats depuis 2 ans, avec François Lancel et Brigitte Michel, la mairesse. Ces trois généraux, avec leur armée de bénévoles qu'ils dirigent, travaillent au quotidien pour réaliser une belle fête. Si on devait comptabiliser leurs heures, le bilan serait très très lourd ! Heureusement, on est dans les cordes grâce à eux.

 

Toi qui connais ces routes par coeur, parle nous un peu du parcours.

C'est un tracé pour puncheurs. Il y a un peu plus de 16 kms, avec 3 côtes. Celle de la Vallée, suivie directement par celle de la Pigeonnière, et on enchaîne avec la côte des Biards, là où Miguel Indurain avait attaqué pour la première fois sur le Tour de France, en 1986. Et puis on a 3 kms de faux plat montant pour conclure. Ces bosses sont relativement brèves, c'est donc logiquement pour les puncheurs. Et on sait que la qualité premières des coureurs français aujourd'hui, c'est peut-être justement d'être des puncheurs avant tout.

Je pense qu'on va avoir une course débridée et très ouverte. Ceux qui ont l'habitude de faire la Polynormande - le circuit est le même à 80% - savent qu'il faut faire la course en tête, avec les nombreuses relances. Les spécialistes des classiques seront à leur avantage. On devrait avoir déjà une belle échappée qui se dessinera après 25 kms de course, après le départ d'Avranches et avant d'arrivée sur le circuit.

 

Pour ton jubilé, on se doute que le rêve serait de voir un Normand champion de France... et à priori, ils sont nombreux à pouvoir le faire, qu'en penses-tu ?

Petite aparté, je n'aime pas trop le terme jubilé... Mais j'ai appris que pour 50 ans, c'est un jubilé, donc je ne peux pas faire autrement. Mais je continuerai d'animer, car c'est un vrai plaisir, et j'ai un projet pour le clap de fin. Même si le clap de fin définitif, ce sera Saint-Martin-de-Landelles, mais je ne dis pas quand. J'ai toujours la même envie de faire ma valise, de rencontrer le public, les coureurs, et j'ai toujours la forme physique.

Pour en revenir à la question de base, on a la chance d'avoir une génération normande brillante, tout comme la génération bretonne, et ils seront durs à battre. Et comme à Saint-Martin-de-Landelles, nous sommes une commune limitrophe, un pied en Normandie, un autre en Bretagne, et même à 8 kilomètres seulement de la région des Pays de la Loire, il y aura évidemment un très très large public. On est au carrefour de ces trois provinces - il y avait d'ailleurs une course qui s'appelait le Circuit des 3 Provinces - et je pense que les trois régions que je viens de citer devraient jouer les premiers rôles et le titre.

Pour les Pays de la Loire, il y a notamment Mathieu Burgaudeau. Côté bretons, on pense forcément à Valentin Madouas, Olivier Le Gac, David Gaudu, et puis pour la Normandie, le local Paul Lapeira, qui habite carrément sur le circuit, Benoît Cosnefroy, Kévin Vauquelin, Guillaume Martin, Anthony Delaplace... Je regrette que Mikaël Cherel ne soit plus dans le peloton, il aurait été le régional. Ce sera assurément une belle fête, les Normands et Bretons se mélangeront, ce sera intéressant.

 

Si tu devais te mouiller un peu, quel serait ton favori ?

On parle évidemment de Benoît Cosnefroy, qui réalise une saison époustouflante. Mais il aura le désavantage d'avoir la pancarte dans le dos. C'est un circuit taillé sur mesure pour lui, et il a déjà gagné la Polynormande. Son nom, avec celui de Valentin Madouas, le tenant du titre, sont ceux qui reviennent le plus. Mais il y en a un autre qui ressort également, c'est celui d'Axel Laurance, le champion du monde espoirs. Il vient de remporter le Tour de Norvège, et son papa a habité à Saint-Martin-de-Landelles, donc il sera un peu comme chez lui. Je regardais la liste de départ, et pour moi, il y a au bas mot 30 voire 40 coureurs qui peuvent gagner ou viser le podium sur les 160 à partir.

 

Pour conclure, rassure-nous un peu : tu n'es pas encore prêt à laisser définitivement le vélo et l'animation de côté ?

J'ai un ami médecin qui m'a dit : "C'est ton ADN, ça te donne de l'adrénaline. Tu as besoin de ça, ça fait partie de toi". Quand c'est une passion et que ça fait partie de ton ADN, tu peux ralentir un peu, mais tu ne peux pas t'arrêter comme ça. Beaucoup d'organisateurs viennent me demander de continuer avec eux. Et bien tant que j'ai l'envie, cette passion, la forme physique et que je ne suis pas déconnecté, j'ai envie de continuer encore un peu. Je saurai dire lorsque je me retirerai. Si je choisis et que la santé me laisse tranquille, ma dernière course sera Saint-Martin-de-Landelles, mais j'ai encore quelques objectifs et projets pour 2026 et 2027... Voilà tout ce que je peux dire aujourd'hui.

Je vais dire un truc qui doit concerner tous les passionnés : je suis moins fatigué quand je prends un micro que quand je suis à rien faire. Alors quand on dit que le travail, c'est la santé, j'ai bien l'intention de le prouver et de le mettre en valeur. Enfin, je ne sais pas si le travail est la santé, en revanche je sais que la passion, c'est la santé !

 

Le mot de la fin ?

Venez chez nous la semaine prochaine ! Comme dirait Marc Madiot, le cyclisme c'est une église, une route autour, et c'est exactement ça à Saint-Martin-de-Landelles. Avec toutes les spécialités régionales. On est Normands mais on est aussi Bretons comme ceux du Stade Rennais, chez nous c'est galette-saucisse. Venez faire la fête avec nous, c'est un rêve qui se réalise. Pour moi bien entendu, mais aussi pour tous ceux du département de la Manche. Il y a une vraie communion autour, et je remercie encore tous ceux qui permettent à cet évènement d'être encore plus qu'un Championnat.

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