Route - Stéphane Heulot : «J'espère une année 2024 un peu plus calme...»

Par Arthur DE SMEDT le 20/11/2023 à 20:11. Mis à jour le 25/12/2023 à 09:32.
Route - Stéphane Heulot : «J'espère une année 2024 un peu plus calme...»
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Photo : @Cyclism'Actu / CyclismActu.net

Coureur professionnel de 1992 à 2002, Stéphane Heulot avait fondé sa propre équipe en 2009 avec Besson Chaussures - devenu Saur-Sojasun puis Sojasun - avant de devenir le manager "européen" de la formation Rally Cycling entre 2019 et 2021. Revenu en 2023 dans le grand bain du cyclisme professionnel au poste de manager général de l'équipe Lotto Dstny - à la suite du départ de John Lelangue - le Rennais de 52 ans a accordé une interview à Cyclism'Actu afin de faire le bilan de sa première saison à la tête de la ProTeam belge, avec 21 victoires au compteur et une 9e place finale au classement UCI. L'impressionnant Arnaud De Lie, la gestion du cas Caleb Ewan, le mercato, la chasse aux points UCI, les objectifs pour 2024... Le manager français est revenu sur de nombreux sujets, et c'est à regarder ou à lire ci-dessous !

Vidéo - Stéphane Heulot... au micro de Cyclism'Actu !

 

Comment allez-vous et quelle est l'actualité du moment chez Lotto Dstny ?

Ça va très bien. Les 'Team Days' sont déjà passés depuis quelques semaines, les calendriers sont établis... Tout suit son cours pour le moment. On a pas de regroupement prévu d'ici le mois de janvier. C'est un choix du staff sportif afin de préserver au mieux la fraîcheur mentale de tous, car les saisons sont longues. On a fait le choix de ne pas participer aux courses australiennes début 2024. On l'a déjà fait l'an passé et ça s'était très bien passé.

 

Quel bilan tirez-vous de votre saison 2023 ?

C'est une année qu'on peut qualifier de pleine, qui est conforme à 100% de ce qu'on peut donner avec la jeunesse du groupe. On a bien scoré, avec dix vainqueurs différents. Pour moi, c'est toujours important d'avoir cette balance entre le nombre de coureurs qui gagnent et un leader qui rapporte toutes les victoires. Ça prouve que tout le monde a fait sa part. On avait pour objectif de faire entre 10e et 12e au classement UCI en début de saison. On est finalement 9e, donc c'est au-delà de nos espérances. J'espère qu'on continuera sur cette même lancée en 2024.

 

Comment expliquez-vous ce retour au premier plan après plusieurs saisons compliquées ?

Tout d'abord, comme je le dis souvent, je ne commente pas les moments où je n'étais pas là. C'est difficile de qualifier le passé lorsqu'on était pas présent. Même s'il faut reconnaître que les saisons 2020 et 2021 ont été compliquées - certes pour tout le monde. Pour avoir eu connaissance de certaines choses, c'est vrai que ce n'était pas évident pour Lotto Dstny à ce moment là, avec de nombreux cas de Covid notamment.

Maintenant, cet élan qu'on a retrouvé en 2023, je ne pense pas que ce soit juste mon effet. C'est un effet plus global, chacun a compris le sens des responsabilités, il y a eu beaucoup d'engagement et d'énergie. Et la mayonnaise a pris tout de suite, c'est assez précieux. Mais il n'est pas question de se reposer sur nos lauriers : 2024 arrive, on remet les compteurs à zéro et on vise déjà plus haut. La performance est un mouvement perpétuel où il ne faut jamais s'endormir. Au moment où on le fait, on regresse. On est donc toujours dans la recherche d'être meilleur demain.

 

Parlez-nous un peu d'Arnaud De Lie, qui incarne ce renouveau de Lotto Dstny ?

Arnaud, c'est un garçon très simple. Il ne se prend pas la tête. Il représente la jeunesse d'aujourd'hui. Il s'amuse sur un vélo et aime la gagne évidemment. Lorsqu'il prend le départ d'une course, il ne pense qu'à passer la ligne d'arrivée en premier. Il incarne vraiment un esprit de leader au sein du groupe. Il transmet la confiance à ses équipiers et réhausse leur niveau de facto. C'est quelqu'un de très positif pour le groupe. Mais encore une fois, il n'est pas question que d'Arnaud De Lie. C'est une bande de copains qui "joue au vélo". Pour eux, courir c'est prendre du plaisir, toujours avec sérieux et professionnalisme bien sûr. Le plus dur, c'est de préserver ce contexte positif.

 

Cette victoire au GP de Québec, que représente-t-elle ?

Je pense que ça a été le moment le plus fort de mon année, en tant que manager. C'était quelque chose dont on avait déjà discuté au mois de janvier. Il faut savoir qu'en tant que meilleur ProTeam, on est effectivement invité sur toutes les grandes épreuves WorldTour. En revanche, contrairement aux équipes WorldTour, on doit assumer tous les frais pour de tels déplacements à l'autre bout du monde. C'est donc un peu la double peine car on a aussi moins de 'start money'. Pour le Canada, on était aux alentours de 60 000 euros de frais, c'est donc forcément un investissement auquel on réfléchit à deux fois.

Mais c'est vrai qu'Arnaud nous avait promis une belle réussite là-bas. Au-delà du fait que c'était sa première en WorldTour, il y a eu tout ce contexte et cette préparation qui a permis d'en arriver là. Forcément, c'est une grande fierté, une joie intérieure très forte. On sait que c'est une victoire qui en appelle d'autres.

 

Comment jugez-vous votre mercato 2023/2024, avec cinq départs et cinq recrues ?

C'est un mercato raisonnable et prudent. On avait une ossature relativement solide. Ma vision et mon objectif, c'est vraiment de revenir en WorldTour en 2026 pour y performer et non pas pour survivre. C'est un travail qui s'anticipe, on est déjà dans cette construction là. L'important, c'est évidemment de maintenir notre noyau dur de jeunes talents. Plus de 50 % de l'équipe est issu de l'équipe de développement. C'est une vraie richesse, c'est ce qui fait nos résultats aujourd'hui. Lotto Dstny l'a initié depuis de nombreuses années, on s'y tient. Donc voilà, on n'est pas sur de grands bouleversements, on fait aussi avec nos moyens.

On veut construire avec cette génération. On a une base solide, évidemment avec Arnaud, mais il ne faut pas oublier les Lennert Van Eetvelt, les Maxim Van Gils, Andreas Kron... et j'en passe. Ils ont tous beaucoup de talents. On a aussi de très bons capitaines de route, des coureurs qui fixent le cap dans l'équipe, comme Victor Campenaerts ou Japser De Buyst. Ce sont des éléments très précieux pour la réussite du groupe.

 

Retrouver le récap' des Transferts Officiels 2023/2024 chez les Hommes en cliquant ICI

Retrouver le récap' des Transferts Officiels 2023/2024 chez les Femmes en cliquant ICI

 

Le gros départ de ce mercato, c'est Caleb Ewan. Pourriez-vous revenir sur ce qu'il s'est passé pour en arriver là ?

Caleb est un grand coureur, on le sait. Maintenant, ça fait quand même deux ou trois ans qu'il n'a pas gagné de façon intéressante. A partir du moment où on a ce statut, cela vous donne des droits, mais aussi des devoirs. C'est ce que j'ai souligné. Je n'avais pas le sentiment que les choses matchaient bien entre lui et le groupe. Encore une fois, je n'ai pas de problème direct avec Caleb, mais je me fais le porte-parole d'un groupe de coureurs. Vous savez, quand les sprints se déroulent à 70 km/h, il est important d'avoir son train et ses équipiers autour de lui, ce qu'ils faisaient parfaitement bien. Sauf que la confiance doit être partagée.

Si l'équipier n'a pas le ressenti de confiance que le leader doit lui donner, il ne va pas prendre tous les risques pour sa vie. Donc à partir d'un moment, il faut se poser autour d'une table et comprendre ce qu'on est capable de faire ensemble ou pas. Et c'est ce qu'on a fait. Je pense qu'aujourd'hui, il va certainement performer chez Jayco AlUla, je n'ai pas le moindres doute là-dessus. Il a du caractère et de l'orgueil, il va vouloir prouver que. Mais c'est clair que si nous avions continué ensemble, c'était plus ou moins une saison ratée pour nous d'un point de vue comptable, et pour lui probablement une fin de carrière. Il faut être respectueux et intelligent, quand deux parties ne peuvent plus fonctionner ensemble, il faut trouver la meilleure solution de séparation. Je lui souhaite le meilleur.

 

C'est tout de même une grosse page qui se tourne. Qui pour prendre sa place dans votre effectif en 2024 ?

Pour moi, Caleb Ewan sera largement compensé l'an prochain. C'est toujours à la fin de la foire qu'on compte les bouses. On verra fin 2024. Je ne suis pas sur une logique de star ou de grand nom. Les grands noms, ils sont en devenir dans l'équipe. On fait notre chemin. On ne nous donnait pas beaucoup de légitimité début 2023, on a prouvé le contraire. C'est encore à nous d'avoir la même réponse fin 2024. Le vélo, c'est aussi ça, de l'instinct et de l'intuition.

 

Où en êtes-vous avec votre équimentier vélo Ridley, dont vous pourriez vous séparer selon les dernières rumeurs ?

Il y a beaucoup de commentaires qui sont faits. Pour l'instant, on ne peut pas communiquer sur ce point, par respect par rapport aux engagements qu'on a. On est sur une logique de pouvoir produire et donner à nos coureurs les meilleures solutions possibles sur le plan de la réussite. Le vélo est le premier outil de performance, c'est important d'être attaché à cela. Même si on a eu de très belles années avec Ridley. Douze ans de partenariat, ça ne s'efface pas comme ça. Mais on a une logique assez claire, on sait où on veut aller, et pour ça il faut parfois faire bouger des lignes. Ce n'est pas toujours simple. Les informations arriveront au moment où il le faudra, mais on est confiant par rapport à tout ça.

 

Les grands objectifs pour la saison 2024 ?

Gagner, toujours gagner ! 21 victoires, c'est un super score, mais passons encore un cran au-dessus et amplifions le quota WorldTour. Ce serait top. Transformer les trois deuxièmes places sur le Tour de France en au moins une victoire. Et puis sinon, rester dans le haut du panier et dans le top 10 du classement mondial pour assurer au mieux notre retour au plus haut niveau pour 2026.

 

La chasse aux points UCI, c'est une ambition assumée chez Lotto Dstny ?

Je pense que dire qu'on ne regarde pas les points, c'est un peu de la langue de bois. Bien sûr, on préfère les victoires. Mais c'est évident que tout le monde est concerné. Il y a eu une mauvaise interprétation et un manque de conscience par rapport aux enjeux qui ont amené à cette relégation, en tout cas en ce qui concerne l'équipe Lotto sur ces trois dernières années. Il y a eu un réveil tardif, peut-être une illusion de penser que c'était un statut acquis.

Aujourd'hui, on connaît les règles, elles sont claires. Il faut être sensibilisé à cela, ça fait partie des responsabilités d'un groupe sportif de savoir où il se situe. Mais comme je l'ai dit en début de saison : on explique les règles, on en parle une bonne fois pour toute, et après on n'a plus besoin de les rabâcher. Evidemment, quand les choses vont bien, ce n'est pas non plus une obsession. Mais pour l'instant, ça reste important, on se doit de suivre ça régulièrement.

 

Dans cette logique, allez-vous comme l'an passé zapper le Giro en 2024 ?

En 2023, c'est un choix qu'on a fait par rapport à la jeunesse du groupe. On a beaucoup de coureurs de moins de 25 ans, on se pose donc la question de savoir ce qu'on va chercher et dans quelle mesure ça rentre dans leur formation et leur développement de manière cohérente. Tout le monde ne s'appelle pas Evenepoel, Pogacar ou Ayuso, on n'a pas que des coureurs précoces. Pour le Giro 2023, on était partagé, mais il s'est avéré que ce n'était pas une erreur. Une grande partie de notre équipe est à fond sur la période des Classiques, qui arrive juste avant le Giro. Il faut un temps de récupération, et puis il faut pouvoir préparer le Tour de France derrière. Donc ça a été un bon choix. Pour 2024, on est en train de débattre pour savoir si on colle à la même stratégie. C'est plus discuté que l'an dernier. Si ce n'est pas pour cette année, ce sera dans tous les cas pour 2025, pour préparer le retour en WorldTour en 2026. On se donne une bonne quinzaine de jours pour décider.

 

Quelles échéances à venir ?

La présentation d'équipe aura lieu le 5 janvier prochain, en Belgique. On partira dans la foulée à Denia pour 8/9 jours de stage. Ce sera notre seul point d'orgue collectif en commun. Derrière, on dispatchera l'équipe sur plusieurs stages en altitude tout au long de l'année, au Teide, en Sierra Nevada...

 

Pour conclure, que peut-on vous souhaitez pour 2024 ?

Je vais me souhaiter une année un peu plus calme. C'est vrai que ça a été une entrée en matière particulièrement lourde. Notamment ce qu'on a vécu avec le décès de Tijl De Decker au mois d'août, ça a été je pense le moment le plus douloureux de ma vie, en tout cas en tant que manager. Remobiliser un groupe dans de telles circonstances, ça a été très éprouvant. J'espère que le plan sportif continuera à être aussi riche et généreux qu'en 2023, mais j'aimerais que sur le plan des émotions négatives et du tragique, ce soit un peu plus ensoleillé en 2024.

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