Cyclism'Actu: Actualités, cyclisme, direct, résultats...
+
A LA UNE

Lilian Calmejane : «Les réseaux sociaux ? Tellement de débiles...»

INTERVIEW
Mis à jour le par Arthur DE SMEDT
Photo : @Cyclism'Actu / CyclismActu.net

Une semaine après l'annonce surprise de sa retraite à seulement 31 ans, soit un peu moins de 10 ans après ses débuts professionnels chez Direct EnergieLilian Calmejane est revenu sur cette décision que l'on attendait pas forcément de si tôt au micro de Cyclism'Actu ! S'il a notamment marqué le cyclisme français avec sa victoire sur La Vuelta 2016 mais surtout sur le Tour de France 2017 à la Station des Rousse - son succès le plus mémorable parmi les 12 que compte sa carrière - le baroudeur albigeois a bien moins performé ces dernières années chez AG2R Citroen Team puis Intermarché-Wanty, lui qui rêvait de pouvoir lever les bras sur le Giro pour intégrer le cercle fermé des vainqueurs sur les trois Grands Tours. Les raisons qui l'ont poussé à ranger son vélo, ses futurs projets, son manque d'épanouissement dans un cyclisme moderne qui a bien changé, sa personnalité authentique, son avis sur la domination de Tadej Pogacar et les suspicions qui l'entoure... Lilian Calmejane s'est confié en longueur pour Cyclism'Actu dans un entretien qui est à lire et regarder ci-dessous !

Lilian Calmejane au micro de Cyclism'Actu

 

"Les choses ne se sont pas vraiment passées comme prévu..."

Lilian Calmejane, vous avez annoncé il y a une semaine votre décision de prendre votre retraite comme coureur professionnel, à 31 ans seulement. Comment expliquer-vous ce choix ?

C'est un choix qui s'est fait en cours de saison. Pour être tout à fait honnête et transparent, comme je l'ai quasiment toujours été tout au long de ma carrière, c'est d'abord à la sortie du Giro que je me suis vraiment fixé sur mon avenir. Ce qui était important pour moi, c'était de ne pas avoir de regret. Et après le Tour d'Italie, je me suis aperçu que c'était compliqué de réaliser mon rêve (de compléter la trilogie de victoires d'étapes sur les trois Grands Tours, ndlr). Mon but premier, c'était de continuer encore un an et d'arrêter en 2025. Dans la foulée de cette décision que j'ai prise avec mes proches et notamment ma femme, on avait plus ou moins un accord avec mon équipe actuelle, Intermarché-Wanty, pour resigner un an et finir en 2025.

Et de fil en aiguille durant l'été, les choses ne se sont pas vraiment passées comme prévu. Cela m'a un peu poussé dans ma réflexion. Je me suis souvenu que par le passé, je m'étais fait la promesse que si un jour c'était un peu compliqué d'obtenir un contrat, c'est qu'il serait peut-être le moment de se poser les bonnes questions et pourquoi pas de tourner la page. Et très naturellement, je n'ai pas souhaité chercher ailleurs un contrat, j'ai préféré passer à autre chose et me diriger vers d'autres défis l'année prochaine. 

 

Revenons un peu sur votre carrière. Vous avez explosé en 2016 chez Direct Energie avec votre victoire sur le Tour d'Espagne, avant la consécration et votre succès à la Station des Rousses sur le Tour de France 2017. Vous avez cumulé 12 succès jusqu'en 2019, puis progressivement décliné en passant chez AG2R Citroen Team, puis enfin Intermarché-Wanty. Comment évaluez-vous votre trajectoire avec le recul ?

Pour moi, c'est assez simple, dans le sens où il faut se souvenir d'où je viens... Je ne viens pas à la base d'une famille ou du monde cycliste. J'ai toujours fait du sport avec sérieux, mais passer professionnel, ce n'était pas du tout un objectif dans ma vie. Ça m'est un peu tombé dessus par hasard. Donc si on prend le déroulé de ma carrière et mes résultats, je ne peux pas vraiment nourrir de regret, car c'était au-delà de mes espérances. Quand je suis arrivé chez les pros, bien sûr que je voulais participer au Tour de France. Mais je m'interdisais un petit peu de penser à remporter une d'étape, c'était un rêve ultime qui paraissait inaccessible. Et au final, tout est arrivé assez vite pour moi.

Les premières années ont été assez fastes, mais une carrière, ce n'est pas une progression linéaire et exponentielle chaque année. Il y a eu des hauts et des bas, un parcours parfois un peu compliqué, mais c'est le lot de toutes les carrières. Dans le cyclisme, il y a plus de moments difficiles que d'euphorie. Maintenant, je ne nourris pas de regret, si ce n'est de ne pas avoir fait le Giro un peu plus tôt dans ma carrière. Car au final, je ne l'ai fait que deux fois, et à une seule reprise en très bonne forme et en bonne condition. C'est à la limite mon seul mon regret. Mais en même temps, si j'avais fait le Giro plus tôt, peut-être que je serais passé à côté d'une victoire sur le Tour ou La Vuelta.

 

"Je me suis cassé les dents à de nombreuses reprises, mais ça m'a permis d'écrire quelques belles lignes"

Cette victoire sur le Tour de France restera comme LE moment fort de votre carrière ?

Oui c'est sûr. En tout cas c'est celui qui reste imprégné dans la tête des gens, et dans la mienne aussi. C'est quelque chose d'immuable. Maintenant, il y a des succès qui m'ont procuré autant d'émotions, qui m'ont filé autant la chair de poule. Si on parle d'émotion pure, ça fait partie de mes meilleurs moments sur un vélo, si ce n'est le meilleur, mais il y en a d'autres dont je me souviendrais toute ma vie.

C'est aussi une victoire qui me ressemble bien, elle illustre bien la manière dont j'ai voulu courir et ce que j'ai voulu transmettre comme émotions. C'est-à-dire tenter des choses, avoir du panache et aller au bout de l'effort. Car je ne pense pas que j'avais les meilleures capacités physiques. Je ne suis évidemment pas arrivé là par hasard, j'avais du talent et un moteur, mais ce que j'ai réalisé, d'autres auraient sûrement pu aussi le faire s'ils avaient eu plus de panache et plus tenté. Je n'ai pas eu froid aux yeux, j'ai beaucoup essayé, je me suis cassé les dents à de nombreuses reprises, mais ça m'a aussi permis d'écrire quelques belles lignes.

 

"Il y a des moments où j'aurais mieux fait de fermer ma bouche, mais ça fait partie de mon histoire"

On se rappellera forcément de ces qualités de baroudeur et de ce panache, mais également de votre personnalité authentique, de votre franc-parler qui vous caractérise et vous a parfois desservi, comme vous l'avez évoqué dans votre message sur vos réseaux sociaux. Garder cette authenticité durant votre carrière, c'était quelque chose d'important pour vous ?

On est soi-même malgré soi. Je suis quelqu'un de très transparent, mais surtout de très spontané. Et quand on a beaucoup de spontanéité, c'est parfois compliqué de freiner ses ardeurs ou de contrôler ses émotions. Je n'ai jamais trop été dans le contrôle des émotions. Même si ce sont deux choses différentes, je pense qu'un coureur comme Thibaut Pinot est un peu sur la même longueur d'onde que moi. Lui c'était plus les émotions pures, comme pleurer, crier... Il y a des personnes comme ça qui sont plus à fleur de peau, qui ont plus de sensibilité, et j'en fais partie. 

Après, il y a des moments où j'aurais mieux fait de fermer ma bouche ou d'effacer ce que j'ai pu écrire. Mais ça fait partie de mon histoire. Je ne pense pas non plus avoir blessé ou heurté beaucoup de monde, même si c'est vrai que j'ai parfois pris position sur des sujets et que je n'aurais pas dû. Je suis quelqu'un qui a été éduqué et qui déteste profondément l'injustice. Donc dès qu'il y a un sujet qui me tient à coeur, j'aime bien réagir et tenter de rétablir des vérités.

Publié le par Arthur DE SMEDT

Vous avez aimé cet article, partagez le ! 

A LIRE AUSSI

INTERVIEW

Yaël Joalland : "Cette chute... j'ai été sacrément touché"

INTERVIEW

Guillaume Martin : "La sécurité... ça ne doit pas être un tabou"

 

A la Une